C’est aux juges de caractériser l’activité à caractère social ouvrant droit à l’exonération
En application des articles L 2333-64 (pour la province) et L 2531-2 (pour l’Ile-de-France) du Code général des collectivités territoriales, les fondations et associations reconnues d'utilité publique, à but non lucratif, dont l'activité est de caractère social ne sont pas assujetties au versement de transport. En l’absence de définition légale des activités de nature sociale permettant de bénéficier de l’exonération de cette contribution, il revient aux juges de retenir les critères permettant de caractériser cette nature.
En l’espèce, le syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif) refuse d’accorder l’exonération du versement de transport à une association gérant une crèche. Les juges du fond rejettent le recours de cette dernière contre cette décision en relevant que le caractère social de l’action de l’association n’est pas établi. Les juges s’appuient pour cela sur les éléments suivants : l’essentiel de ses ressources provient de financements publics, les bénévoles effectuent exclusivement des tâches administratives et ne participent pas à l’accueil des enfants, à la relation avec les parents et à l’amélioration de l’insertion sociale.
Cette décision est cassée par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation. Cette dernière retient que la crèche gérée par l’association accueille des enfants dont certains sont issus d’un milieu défavorisé ou présentent des handicaps, en contrepartie d’une participation modique des parents variant en fonction des ressources et de la composition des familles. Peu importe ensuite, à ses yeux, la part prépondérante des financements publics ou la nature administrative des tâches accomplies par les bénévoles, dès lors qu’ils participent à l’action de l’association.
Cette décision s’inscrit dans la ligne de sa jurisprudence (aux contours parfois flous).
Comment s'apprécie le caractère social d’une activité ?
Il ressort de l’analyse des différentes décisions rendues à propos de cette question que le mode de financement de l’organisme n’est pas, à lui seul, déterminant. Ainsi, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a, par exemple, déjà jugé que l’existence de financement par des fonds publics n’est pas de nature à écarter le caractère social de l’établissement concerné (Cass. soc. 9-3-2000 no 98-13.880 D : RJS 4/00 no 442 ; Cass. 2e civ. 4-4-2013 no 12-15.740 F-D).
D’autres éléments semblent, en revanche, essentiels à la reconnaissance de la nature sociale d’une activité. Tel est le cas de la participation demandée aux bénéficiaires de l’action de l’association ou de la fondation lorsque sa modicité ne permet pas de couvrir le coût réel du service rendu (Cass. soc. 29-2-1996 no 93-12.638 P : RJS 4/96 no 451 ; Cass. 2e civ. 4-4-2013 précité). A l’inverse, le fait que le montant de la participation soit comparable à celui d’établissements privés peut être retenu pour écarter le caractère social (Cass. soc. 9-3-2000 no 98-13.880 D : RJS 4/00 no 442).
Le recours à des bénévoles est également souvent pris en compte pour apprécier la nature de l’action exercée par l’association ou la fondation (Cass. soc. 29-2-1996 no 93-12.638 P : RJS 4/96 no 451). La chambre sociale de la Cour de cassation, pour refuser l’exonération de versement de transport à un centre de rééducation fonctionnelle et de réinsertion professionnelle, s’est ainsi notamment fondée sur l’absence de participation effective des intervenants bénévoles à la réinsertion sociale ou professionnelle, cette action restant du domaine des salariés (Cass. soc. 27-6-2002 no 01-20.467 F-D). La deuxième chambre civile se montre plus souple dans l'arrêt du 21 décembre 2017 en reconnaissant la nature sociale de l’action exercée par l’association malgré la participation des bénévoles aux seules tâches administratives.
Sarah BEN HAFSIA
Pour en savoir plus sur le versement de transport : voir Mémento Social nos 80800 s.