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La vie d’un brevet : réflexes de vigilance pour ne pas perdre ses droits

Un brevet protège une invention technique, nouvelle, inventive et susceptible d’application industrielle pour 20 ans. Il permet à son titulaire d’interdire à des concurrents d’exploiter l’invention brevetée. L’entreprise doit veiller à ne pas perdre cet avantage concurrentiel.


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Si le brevet n’est pas entretenu juridiquement, il sera impossible pour son propriétaire de poursuivre un concurrent réalisant un acte de contrefaçon de son invention. L’objectif pour le titulaire est de ne pas subir les règles de la propriété industrielle à ses dépens, mais de connaître les principaux écueils pour les anticiper.

En général, la vie du brevet doit suivre le rythme de vie de l’entreprise. Celle-ci devra intégrer à sa stratégie de développement l’entretien de son brevet.

Réflexes liés au développement commercial du brevet

L’entreprise propriétaire d’un brevet doit incorporer rapidement dans sa stratégie l’ampleur territoriale de la protection de l’invention, le marché ainsi que le développement commercial et partenarial de son brevet. Chacune de ces réflexions doit s’accompagner de démarches auprès de l’INPI, ou d’autres offices de propriété industrielle.

Le brevet sera-t-il commercialisé hors de France ? Si l’entreprise vise une exploitation internationale, la protection à l’étranger est indispensable. Afin de déterminer l’étendue géographique de la protection et de l’optimiser, le propriétaire du brevet français doit considérer ses objectifs stratégiques.

La stratégie de protection. L’entreprise se demandera où elle souhaite commercialiser son invention, quels sont les marchés auxquels elle peut accéder et à quelles conditions. Elle évaluera le potentiel commercial de son invention dans une perspective à long terme. La couverture géographique peut sécuriser une stratégie de conquête à l’export, mais aussi faciliter la recherche d’un partenaire local, industriel ou financier, pour s’attaquer à un marché lointain.

La stratégie de protection de ses concurrents doit également être identifiée et prise en compte, soit pour être présent sur un même marché, soit pour profiter de l’absence de brevets dans les pays susceptibles de fabriquer le même produit. Dans les deux cas, une veille technologique et économique est un atout précieux.

L’investissement financier. Dès que la stratégie géographique est définie, celle-ci doit être confrontée à l’investissement financier qui peut être consenti afin d’étendre la protection du dépôt à l’INPI à l’étranger.

En effet, se protéger sur une zone géographique large peut être coûteux.

Certains systèmes permettent de mieux gérer les aspects financiers et administratifs et peuvent être actionnés auprès de l’INPI. Il s’agit de procédures centralisées proposées notamment par l’Office européen des brevets (OEB) et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Elles permettent de désigner, via une demande unique auprès de l’INPI, les différents pays ayant un intérêt pour l’entreprise, d’effectuer les démarches dans une seule langue et d’avoir un meilleur échelonnement des dépenses.

Le droit de priorité. La protection à l’étranger doit se décider rapidement. Le premier dépôt ouvre un droit de priorité, qui permet de procéder à une extension de brevet tout en bénéficiant de la date de dépôt initiale. Ainsi, la protection peut être étendue à l’étranger dans un délai de 12 mois à compter de la date du premier dépôt. Au-delà, il sera toujours possible d’étendre la protection, mais sans bénéficier de la date de dépôt initiale et au risque de se voir opposer des dépôts réalisés dans d’autres pays.

Dans tous les cas, le brevet devra être étendu avant sa publication, soit 18 mois après le dépôt. À défaut, l’invention ne sera plus considérée comme nouvelle par les pays où une protection complémentaire serait souhaitée.

Attention ! Sans protection étendue vers d’autres pays, l’invention ne sera pas protégée hors de France.

Comment va être exploité le brevet ? L’entreprise détentrice du brevet peut être en mesure d’exploiter seule l’invention, mais bien souvent elle aura recours à des partenariats pour la développer et mêler différentes technologies. Un brevet peut ainsi faire l’objet de différentes opérations juridiques : partenariat, licence, cession, apport en société, garantie de prêt, ...

Inscription au registre national des brevets. Ces situations seront contractualisées entre les entreprises concernées et respecteront les règles du droit civil dont certaines formalités sont exigées par le Code de la propriété intellectuelle (CPI). Les contrats de brevets doivent notamment être inscrits au registre national des brevets, tenu par l’INPI, afin d’être connus de tous.

Par ailleurs, gérer son identité et celle de ses représentants est primordial. Différents évènements peuvent être inscrits ou reportés à l’INPI tel qu’un changement d’adresse, de nom, de mandataire, ...

L’inscription se fait de manière dématérialisée sur le site de l’INPI. Elle est examinée puis publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle (BOPI) afin de la rendre publique. L’ensemble des événements inscrits sont, par ailleurs, diffusés sur la base de données des brevets, depuis le portail https://data.inpi.fr/ .

Inscription = opposabilité. Les inscriptions ne doivent pas être considérées comme des démarches purement administratives ; elles visent à sécuriser le brevet lui-même, à informer et rendre opposable l’inscription auprès des tiers. Sans une telle démarche, la protection du brevet pourrait être remise en cause dans le cadre d’un contentieux.

A noter : Par ailleurs, l’identité du propriétaire du brevet doit être à jour, à la fois pour les tiers qui ont accès au registre, sur demande ou via les bases de données, mais aussi pour l’INPI lui-même s’il doit communiquer avec le titulaire.

Et si le brevet n’est pas exploité ? En contrepartie de son monopole, l’entreprise propriétaire du brevet peut l’exploiter pour qu’il puisse profiter à la société. Le défaut d’exploitation peut résulter d’une stratégie d’entreprise, celle-ci pouvant choisir de ne pas maintenir en vigueur son brevet, notamment en fonction des avancées technologiques. Le choix de le maintenir peut résulter d’une stratégie d’occupation pour bloquer le développement d’inventions concurrentes.

Si le brevet est maintenu en vigueur, mais non exploité, son propriétaire peut être contraint de concéder des autorisations d’exploitation. Ces licences peuvent être attribuées par le juge judiciaire ou par une autorité administrative dans le cas de l’intérêt de la santé publique, de la défense nationale ou des besoins de l’économie nationale.

A noter : Cette atteinte forte au monopole du brevet doit être largement relativisée ; en pratique, très peu de licences de ce type sont accordées.

Réflexes de maintien en vigueur du brevet

Des taxes doivent être payées chaque année pour maintenir en vigueur son brevet. C’est un acte juridique essentiel, faute de quoi le brevet est déchu, tombe dans le domaine public, et l’invention ne bénéficie plus de protection.

Comment le maintenir en vigueur ? Quel que soit le pays dans lequel un brevet est délivré, des annuités pour le maintenir en vigueur doivent être réglées auprès de l’office concerné à sa date anniversaire.

Paiement d’annuités. Dès qu’un brevet est valable en France, soit après dépôt en France ou via le brevet européen ou une demande de brevet internationale, le paiement des annuités est encadré par des conditions strictes de délais déterminées par le CPI. Les annuités doivent être payées auprès de l’INPI au plus tard le dernier jour du mois anniversaire du dépôt.

A noter : Leur coût varie en fonction de l’âge du brevet ainsi que des réductions applicables. Leur paiement s’effectue exclusivement sur le site https://www.inpi.fr/fr .

Un délai de grâce. Si le propriétaire du brevet laisse passer la date de paiement, il peut se rattraper pendant 6 mois. Dans ce cas, un supplément pour paiement tardif devra être payé, en plus de l’annuité due, d’un montant égal à 50 % de cette annuité.

Attention ! Afin de ne pas oublier cette étape essentielle, l’INPI adresse deux types de courriers : une lettre d’information aux titulaires sans mandataire pour leur rappeler l’échéance à venir et un avertissement, avant déchéance, aux titulaires ou mandataires lorsque le paiement n’a pas été effectué avant le délai de grâce.

Que faire si la déchéance est prononcée ? Un recours en restauration auprès de l’INPI pour un brevet valable en France sera alors possible, mais seulement sous certaines conditions.

Le propriétaire du brevet devra justifier d’une excuse légitime expliquant les raisons du retard de paiement. Cette excuse consistera en une cause étrangère, involontaire et non fautive (p.ex. maladie, redressement judiciaire, ...).

L’INPI examinera le recours afin de déterminer s’il est fondé et restaurera éventuellement le brevet.

Quels que soient les développements commerciaux dans la vie de l’entreprise, des réflexes sont nécessaires afin de valoriser et de sécuriser son brevet, auprès de l’INPI ou auprès des offices de propriété industrielle étrangers concernés.

En pratique : Les chargés d’affaires INPI sont disponibles pour vous accompagner dans vos démarches ou pour vous rencontrer et vous accompagner dans la construction de votre stratégie de propriété industrielle. Vous pouvez contacter l’INPI au 0820 210 211 (0,10 € TTC/min) du lundi au vendredi de 9 h à 18 h ou par e-mail : contact@inpi.fr ou sur le site https://www.inpi.fr/fr

Par Aurélie FLORET, Responsable du service de l’examen des titres au sein de l’INPI

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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