La prise des congés
Elle est obligatoire. En principe, seul le départ de l’entreprise autorise le versement d’une indemnité compensatrice pour les congés non pris. L’autre possibilité est l’affectation d’une fraction des congés non pris sur un compte épargne-temps.
En pratique. Il faut que ce type de compte ait été mis en place dans l’entreprise et le salarié ne peut y placer que les congés qui dépassent 24 jours ouvrables, soit la 5e semaine et d’éventuels congés conventionnels supplémentaires.
Et vous risquez des sanctions. Le non-respect des règles relatives aux congés payés est passible de l’amende liée aux contraventions de 5e classe, pour chaque salarié concerné, soit 7 500 € (C. trav. art. R 3143-1) . Le salarié peut en outre obtenir des dommages et intérêts pour le préjudice qu’il a subi de ce fait.
En pratique. Les congés sont des congés : les moyens technologiques actuels font que les salariés peuvent rester connectés, y compris pendant leurs congés. Prenez garde à ce point, qui ne doit pas aboutir à du travail à distance !
Les garanties
En principe. Le respect des règles relatives à l’organisation de la prise des congés suffit à permettre aux salariés de prendre leurs congés :
- fixation de la période de cp ;
- communication de cette période aux salariés au moins 2 mois avant son ouverture ;
- fixation et communication de l’ordre des départs au plus tard 1 mois avant son départ ;
- modification des dates de cp : les délais sont prévus par accord collectif, et à défaut, sauf circonstances exceptionnelles, 1 mois avant au plus tard.
Conseils. L’organisation de la prise des congés peut être fixée par accord d’entreprise. Mais restent d’ordre public notamment : la période 1er mai/31 oct. incluse dans la période de prise des cp, les cp simultanés des conjoints (ou Pacs) travaillant dans la même entreprise et les 3 délais cités ci-avant.
Convention de forfait congés. Dans ce cas, par convention expresse et écrite, l’indemnité de congés est incluse dans la rémunération versée chaque mois. Cette dérogation ne concerne que l’indemnité de congés : elle ne vous dispense pas de l’application des règles de prise des congés !
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Les salariés « à risques »
Absence du salarié. Certaines absences empêchant la prise des congés vous obligent à les reporter :
- maternité ou adoption (C. trav. art. 3141-2) ;
- maladie, professionnelle ou non, et AT (Cass. soc. 24.02.2009 n° 07-44.488) .
Comment fixer la période de report ? Il n’y a pas de règle légale, mais elle doit dépasser la date normale de façon « substantielle ». En d’autres termes, le salarié doit avoir une chance de prendre ses congés.
Conseil. Le délai de report des congés ne fait officiellement pas partie des thèmes ouverts à la négociation d’entreprise. Mais à notre avis, puisqu’un tel accord peut fixer la période de prise des congés, il est possible d’y prévoir l’allongement de cette période en cas d’obligation de report des congés. Vous avez intérêt à prévoir un délai assez long : à défaut de délai, le salarié pourrait faire valoir la prescription de 3 ans applicable aux congés payés. Voir à ce sujet ACP 10/17 « Quand les congés sont-ils perdus ? ».
Long congé. Sont visés notamment le congé parental, sabbatique, etc. Les salariés ont-ils pris leurs congés avant de partir ? Sont-ils prévus lors de leur reprise ? La jurisprudence européenne, contrairement au juge français à ce jour, estime que le salarié rentrant d’un congé parental doit pouvoir prendre les congés acquis avant et après ce congé (CJUE 22.04.2010 aff. 486/08).
Conseils. Vous avez tout intérêt à prévoir clairement ce point lors du départ ou avant la reprise. Et n’hésitez pas à le formaliser !
Le rôle du bulletin
Les mentions obligatoires du bulletin. En matière de congés, seuls sont obligatoires :
- la mention de la CC applicable ou à défaut, les références aux articles du Code du travail relatifs aux congés ;
- les dates de congés et l’indemnité correspondante.
Conseil. En cas de congés au maintien, il est admis que n’y figure que les dates. À notre avis, calculer et indiquer séparément le montant de l’indemnité est utile, notamment pour comparer le maintien et le 1/10 plus facilement.
Incidence d’un jour férié. Il n’est pas décompté comme jour de congé. En revanche, s’il est compris dans une période de congés, vous n’êtes en principe pas obligé d’indiquer séparément la rémunération de cette journée (Cass. soc. 04.12.1990 n° 85-41.289).
Conseil. Mais il faut alors penser à la déduire lors du calcul de la rémunération au maintien pour la comparaison entre le maintien et le 1/10.
Mais souvent. Nombre de logiciels de paie calculent le droit à congés des salariés, en déduisent les congés pris et ce résultat figure sur le bulletin à titre d’information du salarié.
En pratique. Selon la durée de la période de prise des congés, il pourra y avoir plusieurs zones qui ne seront pas forcément très claires pour les salariés. Une information peut leur être utile, notamment :
- éventuellement, si la période de prise des congés est longue, un solde de congés N-2 : les congés pris devront y être imputés en premier ;
- les congés acquis sur N-1 : leur nombre diminue au fur et à mesure de la prise des congés ;
- les congés en cours d’acquisition : leur nombre augmente au fur et à mesure du travail du salarié.
Les précautions à prendre. Le droit initial à congés, puis ensuite son solde, ne sont pas des mentions obligatoires. En revanche, s’ils figurent sur le bulletin, ils vous engagent. En effet, les juges considèrent que la mention du droit à congés sur le bulletin de paie vaut reconnaissance qu’ils sont dus.
En pratique. Cette solution a été rendue en matière de report de congés. La Cour a admis que puisque les congés non soldés figuraient sur le bulletin, c’est que l’employeur avait admis qu’ils étaient reportés (Cass. soc. 26.03.2014 n° 12-23.634) . A fortiori, elle s’applique aussi aux congés en cours.
Vérifiez l’indemnité de congés
Comparaison maintien et 1/10. L’indemnité équivaut au 1/10 de la rémunération, mais sans être inférieure à la rémunération qu’aurait eue le salarié s’il avait travaillé. Si vous n’avez pas fait cette comparaison à chaque prise de congés, vous devez la faire lors des derniers congés et verser un éventuel solde.
En pratique. Il n’y a pas de règle stricte sur le moment de cette comparaison. À notre avis, une comparaison en fin de période suffit, sauf si vous savez clairement dès le départ que le 1/10 sera plus favorable, notamment lorsque le salarié est passé à temps partiel entre-temps.
Les éléments à comparer. Ce sont les suivants :
- le maintien : si vous n’avez pas individualisé le montant de l’indemnité au maintien lors de la prise des congés, vous devez le recalculer pour chaque période de congés ;
- le 1/10 : c’est celui de la période d’acquisition des congés et non pas des 12 derniers mois. Si les congés conventionnels sont plus longs que les congés légaux, il faut le majorer en conséquence (ex. : pour 32 jours de congés au lieu de 30, le 1/10 = (1/10) / 30 × 32).
Conseil. Si votre logiciel fait le cumul de rémunération pour calculer le 1/10, n’oubliez pas de vérifier ou d’ajouter les jours supplémentaires : ancienneté, mais aussi mères/pères de famille, y compris légaux.
Rappel. L’indemnité de cp a été traitée dans ACP 6/17 « Indemnité de congés payés : les calculs à faire » et « Salaire variable : comment calculer l’indemnité de congés ? ».
Solder l’indemnité
Sur le bulletin. Si le 1/10 s’avère plus favorable que le maintien que vous avez pratiqué (ou l’inverse !) vous devez verser au salarié un solde d’indemnité. Nous vous conseillons d’intituler clairement cette somme sur le bulletin.
Quels paramètres pour ce versement ? L’indemnité de congés est rattachée à la paie de son versement : quelle que soit la période de référence à laquelle elle se rapporte, elle subit donc les taux et plafond de cette paie. Et le plafond n’a pas à être réduit lors de la prise de congés !
La preuve en cas de litige
Le salarié ne peut obtenir d’indemnisation que si c’est à cause de l’employeur qu’il n’a pas pu prendre ses congés. Attention, en cas de contestation du salarié, c’est à l’employeur de prouver qu’il lui a permis de prendre ses congés. Cette règle concerne désormais tous les congés : congé d’été, 5e semaine et congés supplémentaires, y compris conventionnels (Cass. soc. 21.09.2017 n° 16-18.898).
Conseil. En principe, le respect des procédures de fixation des dates de congés suffit à rapporter cette preuve. Soyez également vigilant en cas de modification des dates de congés, qui peut particulièrement être source de litige : vérifiez et respectez les délais applicables et formalisez bien tous les éléments.
Fabienne MILLE
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