Un comité d'entreprise conclut avec une agence de voyages un contrat portant sur un voyage de 40 personnes au Vietnam d'une durée d'une dizaine de jours. Il verse un acompte de 32 660 €, représentant la moitié du prix demandé.
L'agence de voyages ayant été placée en liquidation judiciaire, l'Association professionnelle de solidarité du tourisme (APST) mandate une autre agence pour prendre en charge l'exécution de la prestation en lieu et place de la première agence défaillante, au titre de la mise en œuvre de la garantie financière bénéficiant à ses clients. Cette seconde agence sollicite le paiement du solde du prix du voyage, déduction faite des acomptes versés, puis réclame le règlement de l'intégralité de celui-ci. L'APST, informée de l'immatriculation du comité en tant qu'opérateur de voyages, lui notifie son refus de garantie.
Rappelons que les agences de voyages, en application de l'article L 211-18, II du Code du tourisme, doivent justifier d'une garantie financière suffisante et d'une assurance garantissant les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile professionnelle.
Le comité d'entreprise ayant assigné l'APST en garantie et en paiement, la cour d'appel rejette sa demande. Son pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel est rejeté.
Pour la première chambre civile de la Cour de cassation, en effet, il résulte de l'article R 211-26 du Code du tourisme, dans sa rédaction issue du décret 2009-1650 du 23 décembre 2009, applicable au litige, que la garantie financière spécialement affectée au remboursement en principal des fonds reçus par l'opérateur de voyages au titre des engagements qu'il a contractés à l'égard de sa clientèle ne bénéficie qu'aux consommateurs finaux, de sorte qu'un comité d'entreprise qui intervient en qualité d'organisateur ou de revendeur de voyages et non en seule qualité de mandataire des salariés auprès d'une agence de voyages ne peut pas en bénéficier.
Dès lors qu'elle avait, par une appréciation souveraine des éléments qui lui étaient soumis, relevé que le contrat signé avec l'agence de voyages avait été conclu par le comité d'entreprise qui s'était comporté comme un vendeur direct à l'égard de ses membres, la cour d'appel en avait exactement déduit qu'il avait agi comme un professionnel du tourisme et non comme un mandataire des salariés et qu'il ne pouvait pas, en conséquence, revendiquer le bénéfice de la garantie.
A noter : La première chambre civile s'était prononcée dans le même sens, quoique de manière moins claire, sans « considérant de principe », dans un précédent arrêt, dans lequel elle avait jugé que, dès lors qu'il n'avait pas agi comme simple intermédiaire ou mandataire transparent entre l'agence de voyages et les salariés de l'entreprise, un comité d'entreprise devait être considéré comme un professionnel du tourisme ne pouvant pas, à ce titre, bénéficier de la garantie prévue par les articles L 211-18 et R 211-26 du Code du tourisme (Cass. 1e civ. 29-3-2017 n° 15-26.766 F-PB).
Les critères retenus ici par les juges du fond, auxquels la Cour de cassation reconnaît un pouvoir souverain d'appréciation, pour qualifier le comité de « professionnel du tourisme » étaient notamment les suivants : immatriculation du comité en qualité d'opérateur de voyages (pas pour l'opération en cause), recueil par lui des inscriptions des salariés, négociation du prix du voyage dans l'intérêt de ses adhérents et signature du contrat avec l'agence. À noter que l'argument de l'absence de poursuite de but lucratif par le comité a été écarté par les juges du fond comme non vérifié (le CE pouvait dégager une marge brute) et surtout non pertinent.
Un comité qui organise des voyages ne sera pas nécessairement taxé de professionnel du tourisme. Il reste que ces critères sont, en pratique, assez fréquemment remplis. On ne peut donc que recommander aux comités, pour se prémunir contre de tels accidents, la plus grande vigilance lors de la sélection de leurs partenaires.
La version de l'article R 211-26 issue du décret 2009-1650 a été modifiée à plusieurs reprises, le mot « clientèle » ayant été successivement remplacé par l'expression « consommateur final », puis par le mot « voyageur », mais, pour nous, la solution dégagée ici reste valable en l'état actuel des textes et est transposable au CSE.
On relèvera qu'en l'espèce ce dernier venait aux droits du CE et subira donc l'absence de garantie en application de l'article 9, VI de l'ordonnance 2017-1386 du 22 septembre 2017.
Pour en savoir plus sur la responsabilité civile du comité : voir Mémento comité social et économique et autres représentants du personnel nos 246 s.