L'exploitant d'un laboratoire d'analyses médicales achète plusieurs serveurs informatiques ainsi que du matériel d'impression et de scannage à un fournisseur de matériel bureautique. Il affirme avoir voulu s'équiper d'appareils conformes à des normes réglementaires venant d'être adoptées et ayant vocation à s'imposer, à terme, comme une condition de l'accréditation et du fonctionnement des laboratoires d'analyses. Il fait valoir que le vendeur a manqué à son obligation de conseil, ce qui justifie l'annulation de la vente pour dol ou sa résolution pour faute.
La cour d'appel rejette cet argument. Si le vendeur professionnel est tenu envers l'acheteur, profane dans le domaine du matériel bureautique, d'une obligation de conseil qui lui impose de s'informer des besoins de son client et de l'aptitude du matériel proposé à l'utilisation spécifique prévue, l'acheteur est tenu d'un devoir de collaboration à l'égard du vendeur. Ce devoir lui imposait en l'espèce de porter les informations dont il disposait sur les fonctionnalités et finalités qu'il attendait des nouveaux matériels et sur les nouvelles exigences imposées à sa profession à la connaissance du vendeur non spécialisé dans une clientèle de laboratoires. Il n'appartient donc pas au fournisseur de matériel bureautique professionnel mais grand public de s'enquérir de la réglementation propre à l'activité professionnelle de son client avant de lui proposer un équipement.
à noter : L'obligation de conseil du vendeur est une création de la jurisprudence. Par nature, c'est une obligation de moyen, dont l'intensité varie en fonction de la nature du bien vendu (produit nouveau ou dangereux, appareil ou équipement complexe) et de la qualité des parties (professionnel ou profane). En principe, le vendeur professionnel ne peut pas se retrancher derrière son ignorance pour échapper à son obligation d'information et de conseil. Il est présumé connaître l'information qui entre dans le domaine de sa spécialité (Cass. 1e civ. 19-1-1977 n° 14-12.783 : Bull. civ. I n° 40) et il doit se renseigner sur les besoins de l'acheteur afin d'être en mesure de l'informer sur l'adéquation du bien proposé à l'usage prévu (Cass. 1e civ. 28-10-2010 n° 09-16.913 : RJDA 2/11 n ° 124).
Mais l'acheteur doit, de son côté, préciser l'usage auquel il destine le bien lorsqu'il n'est pas usuel (Cass. com. 11-1-1994 : RJDA 6/94 n° 637). Cette exigence de collaboration est particulièrement étendue en matière de fourniture de matériel informatique (Cass. com. 14-3-2000 n° 97-16.299 ; Cass. com. 14-3-1989 n° 87-13.656 : Bull. civ. IV n° 89). L'arrêt en fournit une illustration.
Pour mémoire : le projet d'ordonnance portant réforme du droit des contrats consacre l'obligation d'information précontractuelle : « Celui des contractants qui connaît ou devrait connaître une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, ce dernier ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant » (art. 1129). A notre avis, la solution retenue en l'espèce devrait subsister.