A l’occasion du règlement de la succession de Madame D. née à Shanghaï en 1920, un notaire mandate un généalogiste afin de rechercher tout acte permettant d’établir un lien de filiation entre la défunte et Madame L. sa fille naturelle présumée. Les recherches ayant été vaines, le conjoint survivant est désigné comme seul et unique héritier.
Madame L. assigne en responsabilité le notaire et le généalogiste. Elle leur reproche de ne pas avoir tenu compte de documents permettant de justifier sa filiation, notamment un acte de notoriété dressé le 30 mai 2008 par un juge d’instance dans lequel trois témoins déclarent qu’elle est née à Pékin en 1939 et que sa mère est Madame D. Elle est déboutée par la cour d’appel.
La Cour de cassation confirme. Le document mentionné par Madame L. n’est pas un acte de notoriété constatant une filiation par possession d’état au sens du Code civil (C. civ. art. 317). Il a été établi sur le fondement de l’article 1er de la loi du 20 juin 1920 ayant pour objet de suppléer, par des actes de notoriété, à l’impossibilité de se procurer les copies des actes d’état civil dont les originaux ont été détruits ou sont disparus par suite de faits de guerre.
A noter : pour dénier à l’acte du 30 mai 2008 la qualification d’acte de notoriété établissant une filiation au sens du Code civil, la cour d’appel relève que les témoins n’ont fait mention d’aucun des trois éléments permettant d’établir la possession d’état : le comportement des intéressés l’un envers l’autre (tractatus) ; la façon dont sont considérés les intéressés par les tiers et l’autorité publique (fama) et enfin le nom des intéressés (nomen). La cour d’appel constate en revanche que les témoins ont affirmé que Madame L. était dans « l’impossibilité de se procurer un acte de naissance », ce dernier ne figurant pas dans les archives du service central d’état civil de Nantes qui recense les actes d’état-civil des Français nés, mariés ou décédés à l’étranger.
On peut tout de même s’étonner qu’un acte destiné à suppléer un acte de naissance disparu à la suite de faits de guerre ne puisse pas établir juridiquement une filiation au même titre que l’acte qu’il remplace.
Olivier DESUMEUR
Pour en savoir plus sur la possession d'état : voir Mémento Famille nos 27200 s.