Un contrat de réservation est signé, par l’intermédiaire d’un agent immobilier, en vue de l’achat d’un chalet dans une résidence de tourisme. Ce contrat prévoit l’engagement de l’acheteur de louer le bien à une société. Après la vente, le chalet est donné à bail commercial à une société qui cesse de payer les loyers et fait l’objet d’une liquidation judiciaire. L’acheteur assigne le vendeur, l’agent immobilier et le notaire en nullité de la vente pour vices du consentement, ainsi qu’en responsabilité et indemnisation de ses préjudices.
La cour d’appel de Toulouse annule la vente aux motifs que le vendeur a sciemment trompé l’acheteur sur la garantie de loyers promise pour l’inciter à acquérir, viciant ainsi, par dol, son consentement donné lors de la signature du contrat de réservation et de l’acte authentique.
Elle rejette la demande de condamnation du notaire. Elle retient que le notaire n’a pas eu connaissance du projet de défiscalisation de l’acheteur et qu’il ne peut pas lui être reproché de ne pas avoir informé l’acheteur des risques inhérents à un bail commercial ou de l’absence de sécurité du placement.
Les juges d’appel rejettent la demande de condamnation de l’agent immobilier de garantir la restitution du prix du vendeur insolvable. Ils jugent que, si l’agent immobilier a commis une faute en n’informant pas l’acheteur des aléas financiers de l’opération, la perte du bien découle du seul choix procédural de l’acheteur de maintenir sa demande de nullité de la vente malgré l’état de liquidation judiciaire de son vendeur et est étrangère à la faute imputable à l’agent immobilier.
La Cour de cassation censure la cour d’appel sur ce point : si la restitution du prix ne constitue pas en elle-même un préjudice indemnisable, l’agent immobilier dont la faute a concouru, au moins pour partie, à l’annulation de la vente pour dol peut être condamné à en garantir le paiement en cas d’insolvabilité du vendeur.
A noter :
Lorsque le préjudice subi par la victime d’un dol est dû à la faute d’un tiers, il peut être condamné non seulement à réparer le préjudice distinct qui résulte de la nullité de l’acte, mais également à garantir l’acheteur de la restitution du prix par le vendeur. Les juges rappellent souvent que la restitution à laquelle un contractant est condamné à la suite de l'annulation d'un contrat ne constitue pas, par elle-même, un préjudice indemnisable (Cass. 1e civ. 28-3-1995 : JCP G 1995 IV, 1355 ; Cass. 1e civ. 14-10-1997 n° 95-19.083 : Bull. civ. I n° 275). Le tiers fautif qui a contribué à l'annulation d'un acte ne peut donc pas être condamné à payer le prix de vente.
Ainsi, un acheteur ne peut pas obtenir la condamnation du notaire à lui verser des dommages-intérêts correspondant au montant du prix de la vente. Il peut en revanche demander que le notaire le garantisse de la restitution du prix par le vendeur en cas d'insolvabilité de celui-ci (Cass. 3e civ. 5-10-2011 n° 09-70.571 FS-D : RJDA 1/12 n° 52 ; Cass. 3e civ. 5-3-2020 n° 18-26.124 F-D).
Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation applique cette jurisprudence à l’agent immobilier fautif.
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