Le jugement ouvrant une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire à l’encontre d’une entreprise interdit aux créanciers d’engager une action en justice contre celle-ci pour obtenir le paiement d’une somme d’argent au titre d’une créance née avant ce jugement (C. com. art. L 622-21, L 631-14 et L 641-3).
Ce texte ne profite qu'à l'entreprise en procédure collective. Ainsi, lorsqu'une société fait l'objet d'une telle procédure, les actions poursuivies contre les dirigeants de celle-ci, en raison de leurs fautes personnelles, ne sont pas soumises à la suspension des poursuites individuelles, vient de préciser la Cour de cassation.
Par suite, dans un cas où les douanes avaient notifié à une société et à son dirigeant un procès-verbal d’infraction pour non-paiement des droits et contributions indirectes sur des boissons importées par la société, le dirigeant de cette dernière avait pu être valablement poursuivi, après la mise en liquidation judiciaire de la société, en paiement par les douanes en sa qualité de personne solidaire ayant permis de commettre ou de faciliter la fraude (application de CGI art. 1799 et 1799 A).
A noter :
La suspension des poursuites individuelles des créanciers contre une société en procédure collective ne fait pas obstacle aux poursuites de l’administration fiscale contre son dirigeant, lorsqu’il est déclaré, sur le fondement de l'article L 267 du Livre des procédures fiscales, solidairement responsable avec la société du paiement des impôts et pénalités dus par celle-ci en raison de manœuvres frauduleuses ayant empêché leur recouvrement ou en cas d’inobservation répétée des obligations fiscales de la société (Cass. com. 21-6-1994 n° 92-16.134 D : RJDA 11/94 n° 1142). Dans l’affaire commentée, la Cour de cassation retient la même solution pour le dirigeant poursuivi sur le fondement des articles 1799 et 1799 A du Code général des impôts, en vertu desquels les peines encourues par l’auteur principal d’infractions aux contributions indirectes s’appliquent aussi, et solidairement, aux personnes ayant facilité la fraude ou procuré sciemment les moyens de la commettre. La Haute Juridiction écarte l'argument du dirigeant poursuivi, qui faisait valoir qu'il n'existait qu'une seule créance fiscale ou douanière sur la société et sur lui et que l'impossibilité d'agir en paiement contre la société devait donc lui profiter.
Aucune suspension des poursuites non plus pour les agissements délictueux commis par le dirigeant, de sorte que les victimes de ceux-ci peuvent se constituer parties civiles au pénal (notamment, Cass. crim. 24-1-1994 n° 93-80.832 D ; Cass. crim. 14-2-1994 n° 93-81.537 PF : RJDA 5/94 n° 590 ; Cass. crim. 23-5-1995 n° 94-81.673 PF : RJDA 1/96 n° 67).
Il n’en va différemment que si le dirigeant social fait lui-même l’objet d’une procédure collective (arrêts précités), le cas échéant par extension de celle de la société.
Documents et liens associés
Cass. com. 29-3-2023 n° 21-21.005 F-B, X c/ Directrice générale des douanes et droits indirects
Retrouvez toute l'actualité en matière de droit des sociétés, droit commercial et de la concurrence dans Navis Droit des Affaires !
Vous êtes abonné ? Accédez à votre Navis Droit des affaires à distance
Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Droit des Affaires pendant 10 jours.