Deux époux souscrivent conjointement un contrat d’assurance-vie. L’épouse décède, laissant pour lui succéder son mari, ses trois filles et trois petits-enfants venant aux droits de leur père prédécédé. Le contrat se poursuit avec pour seul souscripteur le mari, qui décède huit ans après. Des difficultés surviennent lors de la liquidation et du partage.
La cour d’appel rejette la demande de réintégration dans l’actif de succession de la défunte de la moitié de la valeur du contrat d’assurance-vie, au motif qu’au décès de son épouse, le mari a été bénéficiaire du contrat qui constituait pour lui un propre, peu important que les primes aient été payées par la communauté.
La Cour de cassation censure : s’étant poursuivi avec l’époux en qualité de seul souscripteur, le contrat ne s’est pas dénoué au décès de l’épouse. Dès lors, sa valeur constitue un actif de communauté dont la moitié doit être réintégrée à l’actif de la succession de la défunte.
A noter : Lorsqu’il est prévu, comme en l’espèce, que le contrat souscrit conjointement par les époux et alimenté par des fonds communs ne se dénoue pas au premier décès, le survivant s’arroge l’exclusivité des prérogatives sur le contrat. Pour autant, il n’en est pas bénéficiaire au sens de la stipulation pour autrui que constitue l’assurance-vie. Il ne peut donc pas se prévaloir des dispositions du Code des assurances selon lesquelles « le bénéfice de l’assurance contractée par un époux commun en biens en faveur de son conjoint constitue un propre pour celui-ci » (C. ass. art. L 132-16, al. 1). Dès lors qu’il n’est pas dénoué, le contrat alimenté par des fonds communs, qu’il ait été souscrit conjointement par les époux ou individuellement par le survivant, constitue au plan civil un actif de la communauté. Comme tel, il doit être réintégré pour la moitié de sa valeur dans la succession de l’époux prédécédé. Toutefois, pour les successions ouvertes depuis le 1er janvier 2016, cette valeur n’a plus, au plan fiscal, à être intégrée à l’actif de la communauté conjugale lors de sa liquidation, et ce quelle que soit la qualité des bénéficiaires désignés. Elle ne constitue donc pas un élément de l’actif successoral pour le calcul des droits de mutation dus par les héritiers de l’époux prédécédé (Rép. Ciot : AN 23-2-2016 n° 78192 : BPAT 2/16 inf. 48 ; BOI-ENR-DMTG-10-10-20-20 n° 380).
Rémy FOSSET
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Patrimoine n° 28220