Il arrive souvent que la cession des titres d'une société soit assortie d'une garantie de passif, c'est-à-dire d'une convention par laquelle le cédant s'engage à prendre en charge tout passif ayant une origine antérieure à la cession.
La Cour de cassation vient de juger que le bénéficiaire de la garantie est, en principe, l'acquéreur des titres. Et si l'acte de cession peut faire de la société dont les titres sont cédés le bénéficiaire de la garantie, de façon exclusive ou en parallèle avec l'acquéreur, cet acte doit contenir une stipulation claire en sa faveur.
Tel n'est pas le cas, estime la Cour, d'un acte de cession prévoyant, d'une part, que « le garant s'engage à indemniser le cessionnaire de toute augmentation de passif ou de toute diminution d'actif par rapport aux comptes de référence » et, d'autre part, que le cédant prendrait en charge certains coûts supportés par la société. Compte tenu de l'ambiguïté de ces termes, l'acte ne renferme pas de stipulation claire en faveur de la société autorisant celle-ci à se considérer comme bénéficiaire de la garantie par l'effet d'une stipulation pour autrui et lui donnant qualité pour agir en exécution de celle-ci.
A noter : la Cour de cassation a déjà jugé qu'un acquéreur, partie à la cession, était recevable à agir en exécution de la garantie de passif dont la cession était assortie (Cass. com. 1-4-1997 n° 881 : RJDA 7/97 n° 913). L'arrêt ci-dessus, qui déclare la société irrecevable à agir, complète cette jurisprudence par l'énoncé, inédit, du principe selon lequel l'acquéreur est seul considéré comme bénéficiaire, sauf en présence d'une stipulation pour autrui clairement exprimée dans l'acte. Rappelons qu'une clause mettant à la charge du cédant le « reversement dans les caisses sociales » du passif qui viendrait à se révéler après la cession a été considérée comme une stipulation pour autrui au bénéfice de la société (Cass. com. 7-10-1997 n° 1977 : RJDA 12/97 n° 1498).
En l'absence de mention du bénéficiaire dans l'acte, il n'y a donc plus lieu de rechercher la commune intention des parties ainsi que l'avait jugé une cour d'appel (CA Paris 28-6-2002 n° 00-9608 : RJDA 3/03 n° 265) puisque la garantie profite à l'acquéreur.
En pratique : malgré cette solution on ne saurait trop recommander aux parties de déterminer avec précision dans l'acte l'identité du bénéficiaire.
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Sociétés commerciales n° 17872