Un créancier professionnel ne peut pas se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus à moins que le patrimoine de cette caution ne lui permette de faire face à son obligation au moment où il est appelé (C. consom. art. L 332-1 ; ex-art. L 341-4).
Une banque consent à une SCI un prêt cautionné par une personne physique et par une société de cautionnement mutuel. A la suite de la défaillance de la SCI, la banque prononce la déchéance du terme, la société de cautionnement mutuel paie la banque et se retourne contre la caution personne physique. Celle-ci lui oppose alors le caractère manifestement disproportionné de son engagement.
Une cour d’appel la condamne cependant à payer la société de cautionnement mutuel en retenant que la caution qui exerce un recours personnel contre une autre caution ne peut pas se voir opposer les exceptions qui auraient pu l’être à l’égard du créancier.
La décision est censurée par la Haute Juridiction. La sanction prévue par l’article L 332-1 du Code de la consommation prive le contrat de cautionnement d’effet à l’égard tant du créancier que des cofidéjusseurs lorsque, ayant acquitté la dette, ils exercent leur action récursoire, que ce soit sur le fondement de leur recours subrogatoire ou personnel.
A noter :
La solution, selon laquelle le cautionnement manifestement disproportionné est privé d’efficacité à l’égard de tous, est désormais bien acquise (Cass. ch. mixte 27-2-2015 no 13-13.709 PBRI : RJDA 5/15 no 385 ; Cass. 1e civ. 26-9-2018 no 17-17.903 FS-PB : RJDA 12/18 no 944 ; Cass. 1e civ. 5-1-2022 no 20-17.325 FS-B : BRDA 5/22 inf. 16). Elle est sévère pour la caution qui a payé, qu’elle soit professionnelle, comme au cas particulier, ou non, puisqu’elle ne peut pas invoquer les dispositions de l’article 2312 du Code civil (ex-art. 2310), prévoyant qu’en cas de pluralité de cautions celle qui a payé a un recours personnel et un recours subrogatoire contre les autres, chacune pour sa part. La Cour suprême précise d’ailleurs, pour la première fois à notre connaissance, que la solution vaut tant pour le recours subrogatoire que pour le recours personnel de la caution qui a payé.
A notre avis, le principe de l’opposabilité de la disproportion de son engagement par une caution à la caution qui a payé n’est pas remis en cause par la réforme du droit des sûretés, même si le cautionnement conclu après le 1er janvier 2022 et disproportionné sera seulement réduit au montant à hauteur duquel la caution pouvait s’engager à la date où elle a consenti la garantie (voir nos observations au BRDA 22/21 inf. 10).
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