Une entreprise est chargée de la construction d’un bâtiment à usage professionnel. Le maître de l’ouvrage le vend et son acquéreur le loue à une société. Se plaignant de malfaçons et non-conformités, tous trois assignent l’entreprise en indemnisation. L’entreprise conteste sa condamnation en défendant que la réception a été prononcée sans réserve. La cour d’appel lui reproche de ne pas avoir prouvé que les vices étaient apparents à la réception.
La Cour de cassation rejette le pourvoi de l’entreprise concernant l’indemnisation relative au dysfonctionnement des commandes électriques des volets roulants car ces désordres sont apparus à l’usage et elle en doit réparation. Au sujet de la non-conformité du bois des terrasses extérieures, la Cour de cassation retient que la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et censure l’arrêt attaqué. Celui qui agit sur le fondement de l’article 1792 du Code civil doit prouver que les conditions d’application du texte sont réunies. Le maître de l’ouvrage devait donc prouver que la non-conformité n’était pas apparente à la date de la réception.
A noter :
On peut regretter la décision en ce qu’elle estime que la preuve du caractère non apparent à la réception du désordre ou du défaut de conformité incombe au maître de l’ouvrage. Certes, l’arrêt reprend la jurisprudence d’un précédent (Cass. 3e civ. 7-7-2004 n° 03-14.166 : Bull. civ. III n° 142, cité dans l’arrêt), mais pour avoir connu cet épisode, on peut dire qu’il a été particulièrement malheureux. Il s’oppose à la règle selon laquelle la réception sans réserve implique qu’aucune malfaçon n’était alors révélée, règle affirmée dès 1929 par la Cour de cassation (Cass. req. 27-2-1929 : S. 1929 p. 297), ainsi qu’au principe selon lequel tout vice est présumé caché, sauf preuve du contraire (doctrine massive, notamment Mazeaud « Leçon de droit civil » t. 3, 2e vol. 1980 n° 1368-2 ; Malinvaud et Jestaz « Droit de la promotion immobilière » 6e éd. nos 76 et 107). Obliger le maître de l’ouvrage à établir que le vice était caché pour lui, c’est lui imposer une preuve négative difficile et peu compatible avec le principe de responsabilité objective qui pèse sur les constructeurs…