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Que change la loi « Partage de la valeur » ?

Un partage de la valorisation possible dans toutes les entreprises, un partage obligatoire du bénéfice dès 2025 entre 11 et 50 salariés, et une négociation obligatoire sur le partage du bénéficie exceptionnel dans les plus de 50 : voici les mesures que vous devrez ou pourrez mettre en place en fonction de votre effectif. Le point dans cet extrait d'Alertes & Conseils paie.


Par Fabienne MILLE
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©Gettyimages

Sur la non-substitution au salaire

Pour rappel, ce principe est déjà légal pour l’intéressement (C. trav. art. L 3312-4) , l’abondement au PEE (C. trav. art. L 3332-13) , et la PPV. Il est étendu à la participation (C. trav. art. L 3325-1) et aux sommes versées au titre du nouveau PPVE : elles ne peuvent se substituer ni à des éléments de rémunération (cf. assiette SS) en vigueur lors de sa mise en place ou devenant obligatoires (loi, contrat, usage), ni à aucun autre régime d’épargne salariale ou de partage de la valeur, ni à des augmentations ou à des primes prévues par accord, contrat ou usages en vigueur dans l’entreprise/le groupe.

Conseil.

Les exonérations fiscales/sociales de ces sommes ne seront toutefois pas remises en cause si 12 mois se sont écoulés entre le dernier versement de l’élément supprimé et la date de mise en place du PPVE/de la date d’effet de l’accord de participation.

Un PPVE dans toutes les entreprises

Mise en place. 

Un plan de la valorisation de l’entreprise peut être instauré par accord, dans les mêmes conditions que la participation (loi art 10 et 11) . Établi sur rapport spécial d’un commissaire aux comptes, il prévoit :

  • le montant de référence auquel sera appliqué le taux de variation de la valeur de l’entreprise, sachant qu’il peut différer entre salariés selon la rémunération, la classification ou la durée contractuelle de travail pendant la période de présence dans l’entreprise pour ceux qui ne sont pas présents toute l’année (CSS art. L 241-13, III)  ;

  • la formule de valorisation retenue pour les entreprises dont les titres ne se négocient pas sur un marché réglementé ;

  • la date de début du plan (début des 3 ans) et sa date de fin (3 ans à partir du lendemain du début), période sur laquelle est calculé le taux de variation de la valeur ;

  • la ou les dates de versement de la prime ;

  • son éventuelle possibilité d’être reconduit ;

  • il doit être déposé auprès de l’administration : sans observations de l’Urssaf à l’issue d’un délai à fixer par décret, les exonérations sociales et fiscales seront réputées acquises.

Le versement d’une prime. 

Le plan prévoit son versement si la valeur de l’entreprise augmente au cours des 3 ans définis dans l’accord :

  • elle doit bénéficier à tous les salariés d’au moins 1 an d’ancienneté (ou moins si l’accord le prévoit) au début de la période de 3 ans, prenant en compte tous les contrats du salarié dans l’entreprise ou le groupe au cours des 12 mois précédant cette date. Le salarié qui acquiert l’ancienneté ou quitte l’entreprise pendant ces 3 ans n’a pas droit à la prime ;

  • elle est égale au montant de référence applicable au salarié affecté du taux de variation de la valeur de l’entreprise, plafonné à 75 % du PASS. Il n’y a pas de prime si le taux est nul ou négatif ;

  • le taux de variation de la valeur de l’entreprise est son évolution constatée entre le début et la fin du plan ;

  • la prime due est arrêtée dans les 7 mois de la fin du plan et versée en 1 ou plusieurs fois dans les 12 mois suivants.

Utilisation et régime de la prime. 

Le salarié peut affecter tout ou partie de sa prime à un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, Perco) ou d’épargne retraite d’entreprise (Pereco ou Pero). L’employeur l’informe des sommes attribuées et du délai (à fixer par décret) dans lequel il doit faire sa demande d’affectation. Aucun abondement n’est prévu. Les sommes affectées à un plan sont exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite de 3,75 % du PASS/an/salarié. Sur le plan social, les primes versées de 2026 à 2028, qu’elles soient placées ou non, sont :

  • exonérées de toutes les cotisations sociales légales ou conventionnelles, salariales et patronales, de forfait social, participation-construction et contributions FP ;

  • mais soumises à une contribution de 20 % au profit de la Cnav, comme les AGA et les stock-options (CSS art. L 137-13) .

Dans les entreprises < 50 salariés

Participation dérogatoire. 

À titre expérimental pendant 5 ans depuis le 29‑11‑2023, il est possible de conclure un accord ou d’adhérer à un accord de branche agréé prévoyant un calcul de la participation moins favorable que le régime légal (loi art. 4) .

Partage de la valeur à compter de 2025. 

Les entreprises de 11 à moins de 50 salariés dont le bénéfice net fiscal pris en compte pour l’application de la formule légale de la participation aura été d’au moins 1 % du CA pendant 3 exercices consécutifs devront soit (loi art. 5)  :

  • instaurer la participation (accord/accord dérogatoire/adhésion à un accord de branche agréé) ;

  • instaurer l’intéressement (accord/DUE/adhésion à un accord de branche agréé) ;

  • abonder un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, Perco ou Pereco d’entreprise/interentreprises) ;

  • verser une PPV (ACP 1/24 « La PPV remaniée ») .

En pratique.

Devront le faire en 2025 les entreprises en exercice civil qui auront eu 1 % de bénéfice de 2022 à 2024. Sauf pérennisation, l’expérimentation finissant au 29‑11‑28, seront concernés les exercices ouverts de 2025 à 2028. Les sommes liées à ces mises en place auront le régime social/fiscal habituel du dispositif dont elles sont issues.

Entreprise ≥ 50 : bénéfice exceptionnel

L’obligation. 

Lorsqu’elles ouvrent une négociation sur la participation ou l’intéressement, les entreprises soumises à la participation doivent négocier sur la définition d’une augmentation exceptionnelle de leur bénéfice net fiscal et les modalités d’un partage de la valeur avec les salariés lorsqu’elle survient (C. trav. art. L 3346-1) . Les critères de définition incluent notamment :

  • la taille de l’entreprise et le secteur d’activité ;

  • la survenance d’opérations de rachat d’actions de l’entreprise suivie de leur annulation si ces opérations n’ont pas été précédées d’AGA aux salariés (C. com. art. L 225-197-1 s. et L 22-10-59 s.)  ;

  • les bénéfices des années précédentes ou les événements exceptionnels externes à l’entreprise intervenus avant la réalisation du bénéfice.

Attention !

Les entreprises ayant déjà un accord de participation/ intéressement au 29‑11‑2023 doivent engager cette négociation avant le 30‑6‑2024. En revanche, en sont dispensées celles dont l’accord de participation/d’intéressement comporte déjà une clause spécifique sur les bénéfices exceptionnels ou dont le régime de participation est plus favorable que la formule légale.

Sous quelle forme ?

Le partage de la valeur déclenché par les résultats exceptionnels peut se traduire par :

  • un supplément de participation ou d’intéressement si l’entreprise est dotée d’un accord ;

  • l’ouverture d’une nouvelle négociation pour instaurer l’intéressement s’il n’existe pas, ou un supplément de participation/d’intéressement si l’accord existant a donné lieu à versement ;

  • un abondement à un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, Perco d’entreprise/interentreprises, Pereco, à notre avis, y compris interentreprises) ;

  • une PPV.

Participation/intéressement

Des avances sur participation/intéressement. 

Elles peuvent être prévues par l’accord avec une périodicité d’au moins le trimestre (C. trav. art. L 3348-1) et bénéficier au salarié après son accord, selon des formalités qui seront fixées par décret.

Conseil.

Il s’agit d’une nouveauté pour la participation, et d’une limitation au trimestre au lieu du mois pour l’intéressement. Par ailleurs, désormais, en cas de trop-perçu :

  • s’il a été placé, il devient un versement volontaire du salarié et n’ouvre pas droit aux exo fiscales/sociales de la participation ou intéressement ;

  • sinon, l’employeur le retient sur le salaire dans la limite de 1/10 (C. trav. art. L 3251-3)  ;

  • si l’employeur ne le récupère pas, il s’agit selon nous d’un complément de salaire ne bénéficiant d’aucune exo sociale ni fiscale.

À noter aussi sur la participation. 

D’autres modifications sont intervenues :

  • l’obligation de recalculer le montant de la réserve spéciale lorsque la déclaration des résultats est rectifiée par l’administration ou le juge est légalisée (C. trav. art. L 3326-1-1)  ;

  • sauf pour celles bénéficiant déjà de la mesure, la suppression du délai de 3 ans pour instaurer la participation pour les entreprises qui franchissent le seuil de 50 salariés en ayant déjà un accord d’intéressement (loi art. 7) .

Intéressement et bas salaires. 

L’accord peut prévoir des salaires plancher et/ou plafond pour la répartition individuelle proportionnelle aux salaires (C. trav. art. L 3314-5) .

En pratique.

Cette règle permet de sécuriser les accords qui prévoyaient déjà ce mécanisme.

Et sur l’épargne et actionnariat salarié

On peut noter particulièrement :

  • au 1‑7‑2024, les PEE, Pereco et Pero devront permettre l’acquisition de parts d’au moins un fonds labellisé au titre du financement de la transition énergétique et écologique ou de l’investissement socialement responsable (C. trav. art. L 3332-17 ; C. mon. fin. art. L 224-3)  ;

  • la modification d’un PEI entre employeurs pris individuellement est simplifiée (C. trav. art. L 3333-7)  : l’ajout de nouvelles possibilités d’affectation des sommes recueillies s’applique dès l’information des adhérents sans droit d’opposition, et l’application des autres modifications n’est plus reportée à l’exercice suivant la date d’information ;

  • la distribution des AGA est assouplie (loi art. 17) .

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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