M X et Mme Y demandent à ce que soit adjoint au nom de leur fils le nom de Mme X. La requête est rejetée, le garde des Sceaux comme les juridictions du fond considérant que les requérants ne justifient pas d'un intérêt légitime (C. civ. art. 61).
Tel n’est pas l’avis du Conseil d’État. Des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par l'article 61 du Code civil pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi. Les Hauts Magistrats considèrent que de telles circonstances exceptionnelles sont caractérisées en l'espèce dès lors que les requérants :
- avaient décidé avant la naissance de leur fils qu'il porterait leurs deux noms accolés, mais qu’à la suite d’un accouchement difficile, le père a finalement déclaré l’enfant en lui attribuant son seul nom parce que l’officier d’état civil l’avait fortement dissuadé d’opérer un tel choix au regard des importants « tracas administratifs » ultérieurs que pareil choix pourrait occasionner pour l’enfant ;
- ont présenté une demande tendant au changement de nom de l’enfant environ 1 an et demi après la naissance alors que les complications consécutives à l’accouchement avaient perduré durant plus d’un an et conduit la mère à subir plusieurs interventions pendant cette période.
À noter : Cet arrêt est une confirmation de jurisprudence. Des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par le Code civil (CE 31-1-2014 n° 362444 : BPAT 2/14 inf. 58).
L'arrêt fait ici preuve d’une particulière souplesse dans l'appréciation du caractère exceptionnel des circonstances requises pour autoriser un changement de nom. En effet, s’il fait état du contexte particulier ayant précédé la déclaration de naissance, force est de constater que le père de famille aurait pu ne pas suivre les conseils de l’officier d’état civil et confirmer le choix arrêté avec sa compagne.
Olivier DESUMEUR
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit de la famille n° 31930