Une société confie à un transporteur l’acheminement, de France en Belgique, d’un colis contenant un dossier de candidature à un appel d’offres. La lettre de transport prévoit que le colis doit être livré avant 12h le lendemain de son expédition. Le colis ayant été livré en retard, la candidature de la société est rejetée. Elle poursuit alors le transporteur en paiement de dommages-intérêts en raison de la perte de l’appel d’offres et des marchés à venir.
Une cour d’appel rejette cette demande. Elle retient qu'aucune faute inexcusable n'étant caractérisée, le transporteur peut opposer ses conditions générales figurant au dos de la lettre de voiture et, notamment, la clause aux termes de laquelle il ne garantit pas « les préjudices causés du fait d’un retard dans la livraison de l’envoi ».
Décision censurée par la Cour de cassation qui juge nulle la clause d’un contrat relevant de la convention de Genève du 19 mai 1956 relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite « CMR », qui exonère le transporteur de toute responsabilité pour retard.
A noter : la CMR relative au contrat de transport international de marchandises par route est applicable à tout transport routier de marchandises effectué à titre onéreux lorsque les lieux de prise en charge et de livraison de la marchandise sont situés dans deux Etats différents dont l’un au moins est contractant à cette convention ; tel est le cas de la France. La CMR prévoit notamment que, en cas de retard de livraison, si l’expéditeur prouve qu’un préjudice en est résulté, le transporteur est tenu de payer pour ce préjudice une indemnité qui ne peut pas dépasser le prix du transport (CMR art. 23, al. 5). En outre, à peine de nullité, il ne peut pas être dérogé aux dispositions de cette Convention (CMR art. 41, al. 1).
Un cour d'appel avait déjà jugé que le transporteur est tenu d'indemniser le préjudice occasionné par le retard à moins qu'il ne prouve que ce retard est imputable à l'une des causes prévues par la CMR (art. 17 ; notamment faute de l'ayant droit, vice de la marchandise, circonstances inévitables : CA Paris 2-12-1981 : BT 1982.73).
Dans la présente affaire, le transporteur avait invoqué l'article 29 de la CMR prévoyant que les clauses contractuelles excluant ou limitant sa responsabilité sont inopérantes en cas de faute équivalente au dol, ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Mais il résulte de la décision de la Cour de cassation que le retard dans la livraison, dès lors qu'il cause un préjudice, est une cause de responsabilité de plein droit dont le transporteur ne peut pas s'exonérer totalement.
Vanessa VELIN
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 25309