Les groupes français seront redevables d’un impôt supplémentaire à compter de 2024…
La réforme fiscale internationale de l’OCDE prévoyant l’instauration, au niveau mondial, d’une imposition minimale de 15 % à la charge des groupes multinationaux opérant dans plusieurs juridictions a été introduite dans le droit communautaire en décembre 2022 par la directive « Pilier 2 » (Dir. UE 2022/2523 du 14-12-2022). Celle-ci prévoit une transposition des règles « GloBE » (« Global Anti-Base Erosion » ou « règles globales anti-érosion de la base d’imposition ») dans les législations nationales des États membres au plus tard le 31 décembre 2023, avec une première application sur les exercices fiscaux ouverts en 2024.
En France, elle concernera tous les groupes, y compris ceux opérant dans une seule juridiction de l’Union européenne, dès lors que leur chiffre d’affaires consolidé annuel est supérieur à 750 M€ sur au moins deux des quatre exercices précédents. Les entreprises concernées devront alors calculer un taux effectif d’impôt (TEI) selon les règles GloBE dans chacune des juridictions où elles opèrent et seront redevables d’un impôt complémentaire (« top-up tax ») si ce taux est inférieur au taux minimal de 15 %.
À ce jour, la France n’a pas encore transposé les règles GloBE dans sa législation nationale.
… mais des différences temporaires existeront dès 2023
Compte tenu de ce calendrier et en l’absence de règlement de l’ANC, les groupes établissant leurs comptes consolidés au titre de leur exercice clôturant au 31 décembre 2023 se trouveraient contraints de prendre en compte le dispositif GloBE dans le calcul de leurs impôts différés (pour plus de détails, voir FRC 7/23 inf. 4).
L’ANC introduit une exception au principe de reconnaissance des impôts différés en lien avec « Pilier 2 »…
Devant la complexité des calculs et les délais laissés aux groupes pour mettre en œuvre la réforme fiscale, il devenait urgent que l’Autorité des normes comptables amende le règlement ANC n° 2020-01 afin d’y introduire, à l’instar des IFRS, une exception à la constatation d’imposition différée induite par « Pilier 2 ». C’est désormais chose faite.
Pour rappel, le règlement ANC n° 2020-01 pose un principe de reconnaissance obligatoire (sauf exceptions ciblées ; voir Mémento Comptes consolidés n° 3658) des impôts différés, au titre notamment de :
toutes les différences temporaires imposables ; et
toutes les différences temporaires déductibles, dès lors que le recouvrement de l’impôt différé actif qui en résulte est probable.
Le règlement ANC n° 2023-02 (en cours d’homologation) modifiant le règlement ANC n° 2020-01 prévoit désormais une exception à la comptabilisation des actifs et des passifs d’impôts différés liés à l’application des règles GloBE, et ce, de manière définitive (Règl. ANC 2020-01 art. 272-7).
Cet amendement n’entrera en vigueur qu’à compter de la date de sa publication au Journal officiel.
Pour les comptes consolidés semestriels et les clôtures décalées de 2023, voir FRC 7/23 inf. 4.
… sous réserve d’une information en annexe dès 2023
Le règlement ANC n° 2023-02 (en cours d’homologation) impose aux groupes concernés une obligation d’information dans l’annexe des comptes consolidés.
Pour les exercices ouverts avant l’entrée en vigueur du dispositif GloBE, c’est-à-dire en 2023, les groupes devront fournir dans leur annexe des informations qualitatives, mais également des informations quantitatives (si disponibles) sur leur exposition à l’imposition minimum mondiale (Règl. ANC 2020-01 art. 282-27).
Exemple :
Le règlement ANC n° 2020-01 (commentaire IR 4 sous l'article 282-27) donne à titre d’exemple :
pour les informations qualitatives : des informations sur la ou les entités touchées par l’impôt minimum mondial et les principales juridictions dans lesquelles le groupe est exposé ;
pour les informations quantitatives, si disponibles :
une indication de la proportion des bénéfices d’une entité qui pourrait être soumise à l’impôt minimum mondial et le taux d’imposition effectif moyen applicable à ces bénéfices ; ou
la façon dont le taux d’imposition effectif moyen de l’entité serait impacté si l’impôt minimum mondial était en vigueur.
Pour les exercices ouverts après l’entrée en vigueur du dispositif GloBE, c’est-à-dire en 2024, l’annexe devra indiquer de manière distincte, en complément de la ventilation entre impôts exigibles et impôts différés, la charge d’impôt comptabilisée au titre du dispositif GloBE.
En effet, le compte de résultat consolidé ne présente qu’une rubrique « Impôts sur le résultat » comprenant l’ensemble des impôts exigibles et différés qui ne permet pas d’avoir cette information en lecture directe.