Ouverte par le Président de la République, la quatrième conférence sociale pour l’emploi, qui s’est tenue le 19 octobre 2015 au Palais d’Iéna (la CGT et Solidaires ont refusé d'y participer), était organisée autour de 3 tables rondes ayant respectivement pour thème :
La sécurisation des parcours professionnels et la création du compte personnel d’activité ;
Transition énergétique, COP 21 : les enjeux pour l’emploi, la croissance verte et la formation ;
Nouvelle France industrielle et transformation numérique.
A l’issue de la conférence, le Premier ministre a présenté la nouvelle feuille de route sociale pour l’année à venir. Elle propose quelques mesures concrètes intéressant directement les entreprises et les salariés et fixe ou précise le calendrier de futures réformes.
Compte personnel d’activité : un projet de loi prévu pour début 2016
La création du compte personnel d’activité (CPA) est prévue pour le 1er janvier 2017 par la loi 2015-994 du 17 août 2015. La conférence sociale du 19 octobre en détaille les contours, sur la base du rapport d’étape transmis par l’organisme France Stratégie. La création de ce compte a pour objectif de garantir la continuité des droits sociaux afin de favoriser la mobilité professionnelle. Le nouveau dispositif devrait dans un premier temps s’appuyer sur les comptes personnels existants : compte personnel de formation, compte de prévention de la pénibilité, compte épargne temps pour les personnes qui en sont dotées. Devraient également s’y ajouter, notamment, un portail des droits numériques, une montée en puissance du conseil en évolution professionnelle et un abondement pour les jeunes sans formation initiale.
Le Gouvernement doit transmettre avant fin octobre aux partenaires sociaux un document devant servir de base à la négociation d’un accord relatif aux principes et aux méthodes de construction du compte personnel d’activité et plus largement de la sécurisation des parcours professionnels. Cet accord doit intervenir avant la fin de l’année 2015 pour la présentation d'un projet de loi en vue d'une adoption par le parlement au cours du premier semestre 2016.
L'accord doit également fixer un calendrier de concertation ou de négociation sur d'autres thèmes relatifs à la sécurisation des parcours professionnels. Pourraient notamment être abordées au cours de l’année 2016 les questions suivantes :
évaluation de la politique publique de la mobilité ;
réexamen des conditions d’ancienneté requises pour certains congés légaux ou conventionnels ;
extension et portabilité du compte épargne temps ;
généralisation de la couverture prévoyance.
Réforme du Code du travail : des orientations annoncées dès le 28 octobre
Le Gouvernement a annoncé qu’il donnera des suites ambitieuses au rapport Combrexelle selon des orientations que la ministre chargée du travail présentera le 28 octobre 2015. Il s’agirait d’articuler le Code du travail en 3 niveaux : le socle des droits et des principes fondamentaux garantis par la loi et auxquels il ne pourrait être dérogé ; des dispositions relevant des accords collectifs ; les règles venant suppléer l’absence d’accord. La hiérarchie des normes ne serait pas inversée et la durée du travail, le CDI ou le Smic ne seraient pas remis en cause. Cette nouvelle architecture serait appliquée dès 2016 à certains domaines de ce Code. Après une concertation avec les partenaires sociaux sur le sujet, les modifications annoncées pourraient être insérées dans le projet de loi précité.
Comme le rapport Combrexelle, le Gouvernement souligne la nécessité d’un renforcement des accords collectifs et du dialogue social, ce qui suppose que les acteurs de ces négociations soient mieux formés. Il évoque à cet effet la possible création d’un « chèque syndical » (chèque d'un certain montant distribué chaque année à chaque salarié qui pourra décider de le remettre à l'organisation syndicale de son choix).
Le Premier ministre a, par ailleurs, réaffirmé le souhait de réduire le nombre de branches professionnelles et d’avancer rapidement sur le sujet. Le but est de parvenir à 200 branches dans les 2 ans et à terme à 100 branches, contre près de 700 aujourd’hui.
Des évolutions attendues pour assurer la qualité de vie au travail à l’ère du numérique
Le projet de loi pourrait poser des principes fondamentaux visant à assurer la qualité de vie au travail dans l’environnement numérique, leur mise en œuvre étant largement renvoyée à la négociation collective.
Pourraient être reprises des mesures préconisées par le rapport Mettling, « Transformation numérique et vie au travail », remis récemment au Gouvernement : reconnaissance d’un droit à la déconnexion, réforme du forfait-jours pour mieux prendre en compte l’impact des outils numériques sur l’organisation du travail…
Dans ce but, le Gouvernement annonce qu’il missionnera prochainement le Conseil d’orientation des conditions de travail afin d’expertiser les effets du numérique. Il compte, par ailleurs, inviter les partenaires sociaux à revoir le régime du télétravail en révisant l’accord national interprofessionnel de 2005 sur le sujet, en vue de l’adapter aux nouvelles formes du télétravail (« coworking », nomadisme et télémanagement) et de veiller à la préservation de la dimension collective du travail.
De nouvelles mesures en faveur des jeunes et des chômeurs de longue durée
Le Gouvernement a présenté de nouvelles mesures de lutte contre le chômage des jeunes pour offrir à ces derniers un véritable « droit à la nouvelle chance ». Ce droit pourrait se traduire, notamment, par :
Un abondement du droit à leur compte personnel d'activité (CPA) à hauteur du nombre d’heures nécessaires à l’acquisition d’un premier niveau de qualification, les modalités de cet abondement devant être précisées dans le cadre du dialogue relatif à la mise en place du CPA ;
L’extension de la garantie jeune à tous les territoires volontaires, alors que ce dispositif est aujourd’hui expérimenté dans 72 départements ;
L’intensification des actions de retour à l’emploi ;
Le développement des actions de parrainage vers l’emploi avec la mise en ligne début 2016 d’une plate-forme du parrainage ;
La poursuite du plan de relance de l’apprentissage avec en particulier la mise en place d’un « statut de l’apprenti ».
Plusieurs mesures devraient être mises en place pour favoriser le retour à l’emploi des chômeurs de longue durée. Citons notamment :
La création, début novembre 2015, d’une prestation « suivi dans l’emploi » devant permettre de sécuriser le recrutement des personnes éloignées de l’emploi en les accompagnant dans les 3 mois suivant leur embauche ;
La mise en place d’aides à la garde d’enfants ;
Le lancement d’actions visant à mieux faire connaître aux entreprises certains dispositifs tels que le « suivi dans l’emploi » et les périodes de mises en situation en milieu professionnel. Les Direccte devraient lancer d’ici à la fin de l’année une campagne d’information pour proposer aux entreprises d’apparaître dans une liste locale de volontaires pour accueillir des demandeurs d’emploi dans le cadre de l’immersion.
Les services publics de l’emploi seront mobilisés avec, par exemple :
La mise en place d’un accompagnement plus personnalisé des demandeurs d’emploi ;
Le développement de nouveaux services numériques, comme le lancement de l’Emploi Store en juillet 2015 : celui-ci devrait comporter en 2016 un nouvel espace dédié aux services aux entreprises (service de dépôt des offres, de recherche de candidats ou d’aide au recrutement, notamment pour les TPE et PME).