Récemment, la Cour de cassation a eu par trois fois l'opportunité de préciser, à l'occasion de ventes immobilières, l’obligation de mise en garde qui pèse sur le notaire, composante de son devoir, plus général, de conseil.
I. Dans une première affaire, sa responsabilité est engagée pour n’avoir pas informé de manière claire et précise les acquéreurs sur les modalités de desserte de la propriété acquise. L’accès était assuré notamment par un chemin carrossable, propriété du voisin, condamné par ce dernier quelques années plus tard. L’acte de vente mentionnait le conflit qui avait opposé le propriétaire du chemin au vendeur et l’arrêt qui avait débouté ce dernier de sa demande de droit de passage était joint. L’acte indiquait aussi que l’acquéreur en faisait « son affaire personnelle à l’entière décharge du vendeur et notaire (…) ». Mais, pour la Cour de cassation, le notaire aurait dû informer les acquéreurs de la portée et des effets de la tolérance de passage, librement révocable, en procédant à la qualification juridique de la situation de fait et en mettant en garde les parties, en des termes accessibles, sur les risques induits au regard des conditions de desserte du fonds vendu.
II. Dans une deuxième affaire, il est encore question du défaut de mise en garde du notaire, à l’occasion de la vente d’un terrain à bâtir, qui s’est avéré inconstructible. Les clients se sont engagés à l’acquisition, sans l’intermédiaire du notaire, par la régularisation d’un compromis de vente directement entre les parties et avec l’entremise d’un agent immobilier. A l’avant-contrat, fait défaut la condition suspensive d’obtention d’un permis de construire. Au stade de l’acte authentique, le notaire prend la précaution d’obtenir à titre informatif un certificat d’urbanisme positif. Toutefois, l’accomplissement de cette seule formalité par le praticien ne suffit pas à satisfaire l’obligation qui pèse sur lui de conseil et de mise en garde. La Haute Juridiction lui fait grief de ne pas avoir appelé l’attention des acquéreurs sur le fait qu’un tel document ne permettait pas de vérifier la constructibilité du terrain au regard du document d’urbanisme.
III. Dans une dernière affaire, il était reproché aux notaires un défaut de conseil quant à la garantie intrinsèque d’achèvement due à l’acquéreur dans le cadre d’une vente en l’état futur d’achèvement. L’acte notarié mentionnait une clause d’inaliénabilité qui interdisait au vendeur de céder et d’hypothéquer les parcelles sans l’accord écrit de la banque qui finançait les constructions. Par suite, les notaires devaient appeler l’attention de l’acquéreur sur la fragilité de la protection assurée par la garantie intrinsèque offerte par le vendeur au regard de cette clause bien que seule l'absence d'hypothèque ou de privilège soit requise comme condition pour autoriser une garantie intrinsèque.
Caroline CROS
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Vente immobilière nos 70250, 70285 et 70295