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Le contrat passé en fraude de la procédure de contrôle des conventions réglementées est annulable

L’avenant accordant une indemnité de licenciement à un salarié d’une société et conclu juste avant qu’il en soit nommé dirigeant afin d’éluder la procédure de contrôle des conventions réglementées est entaché de fraude. Il peut donc être annulé s’il est préjudiciable à la société.

Cass. com. 5-1-2016 n° 14-18.688


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1. Sauf exception, la conclusion d’une convention entre une société anonyme (SA) et l'un de ses mandataires sociaux (directeur général, directeur général délégué, administrateur, membre du directoire ou du conseil de surveillance) est soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration (ou de surveillance) et à l’approbation de l'assemblée générale (C. com. art. L 225-38, L 225-40, L 225-86 et L 225-88). La convention conclue sans autorisation préalable du conseil peut être annulée si elle a eu des conséquences dommageables pour la société (art. L 225-42, al. 1 et L 225-90, al. 1 du même Code).

A la lettre, le dispositif s’applique seulement si le cocontractant de la société a déjà la qualité de mandataire social à la date de la conclusion de la convention. La convention est-elle annulable lorsqu’elle a été conclue avant que le cocontractant n’acquière cette qualité dans le but d’éluder la procédure de contrôle ? C’est la question qui a été posée à la Cour de cassation à propos d’un avenant à un contrat de travail conclu entre une SA et un futur dirigeant.

Les faits

2. Une SA embauche un directeur de site en 2002. Le contrat de travail de celui-ci est modifié par un avenant, daté de février 2007, précisant qu’une indemnité lui serait allouée en cas de licenciement pour une cause autre que pour faute grave, force majeure ou faute lourde. En novembre 2007, l’intéressé est nommé administrateur par le conseil d’administration puis directeur général par l’assemblée générale. Trois ans plus tard, ses fonctions de directeur général prennent fin, son mandat d’administrateur est révoqué et il est licencié. Il réclame l’indemnité prévue par l’avenant. La société et les organes de la procédure de sauvegarde dont celle-ci fait l’objet invoquent alors la nullité de l’avenant au motif qu'il a été conclu en fraude des dispositions légales régissant les conventions réglementées.

Une convention passée en fraude de la procédure de contrôle est annulable

3. Pour la première fois, la Cour de cassation pose expressément le principe : une convention intervenue entre une société et son dirigeant peut être annulée si elle est entachée de fraude pour avoir été conclue dans le dessein de l’exclure du champ d’application des conventions réglementées par les articles L 225-38 s. du Code de commerce. De précédentes décisions faisaient déjà référence à la fraude (Cass. com. 2-7-1974 n° 72-14.218 : Bull. civ. n° 216 à propos d’une cession de droits sociaux ; Cass. soc. 10-4-2013 n° 11-25.841 : BRDA 10/13 n° 1 relatif à un contrat de travail stipulant une indemnité conventionnelle de licenciement).

La Haute juridiction écarte ainsi l’argument de l’ancien salarié qui soutenait que seules les conventions conclues sans autorisation préalable du conseil pouvaient être annulées et non celles entachées de fraude pour avoir été conclues de manière à échapper à la procédure de contrôle.

La nullité est encourue que le conseil n'ait pas été consulté, qu'il ait refusé de donner son autorisation ou encore qu’il l’ait donnée irrégulièrement (Cass. com. 18-10-1994 n° 92-22.052 : RJDA 12/94 n° 1307) et aussi désormais lorsque l’absence d’autorisation résulte d’une fraude.

4. Même lorsqu’existe une fraude – et alors qu’il est généralement admis qu’elle fait exception à toutes les règles – il résulte de la décision commentée que l’action en nullité demeure soumise au régime défini par le Code de commerce en matière de convention réglementée : la convention n’est annulable que si elle a causé un préjudice à la société.

Réunion des conditions justifiant l'annulation de la convention en l'espèce

5. La Cour de cassation a jugé que l’avenant au contrat de travail devait être annulé.

D’une part, l’avenant était bien intervenu en fraude des dispositions légales régissant les conventions réglementées. Il avait été rédigé, non pas en février 2007, mais au cours des jours ayant précédé la tenue du conseil d’administration et de l’assemblée générale nommant le salarié administrateur et directeur général. Lors d’une enquête, celui-ci avait indiqué que, sans cet avenant lui assurant une indemnité en cas de perte de son mandat social, il n’aurait jamais accepté le mandat de directeur général. L’avenant avait été établi afin de lui permettre de faire face aux conséquences personnelles de sa nomination en qualité d’administrateur. En ce qu’il prévoyait le versement d’une indemnité en cas de licenciement, cet avenant avait pour cause, non le contrat de travail liant l’intéressé à la société mais sa nomination comme directeur général. Le fait de l’antidater permettait de l’exclure du champ d’application des conventions réglementées et d’éluder l’autorisation du conseil d’administration et l’approbation de l’assemblée générale.

D’autre part, l’avenant, qui imposait à la société d’allouer à l’intéressé une indemnité complémentaire de licenciement représentant l’équivalent d’une année de sa rémunération de mandataire social, avait suscité un important contentieux entre les parties ; il avait donc eu des conséquences dommageables pour la société. Il importait peu qu’une décision rendue dans le cadre d’une instance initiée devant une juridiction prud’homale ait refusé d’ordonner l’exécution de l’avenant.

Pour en savoir plus : voir Thèmexpress Conventions réglementées, éd. Francis Lefebvre 2016.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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