Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 23 mars 2020, par le Premier ministre, conformément à l'article 46, 5ème alinéa et à l'article 61,1er alinéa de la Constitution, de la loi organique d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19.
Par décision en date du 26 mars 2020, le Conseil constitutionnel décide que la loi organique d'urgence est conforme à la Constitution dès lors qu'elle se borne à suspendre jusqu'au 30 juin 2020 le délai dans lequel le Conseil d'État ou la Cour de cassation doit se prononcer sur le renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel et celui dans lequel ce dernier doit statuer sur une telle question et qu'elle ne remet pas en cause l'exercice de ce recours ni n'interdit qu'il soit statué sur une QPC durant cette période.
La loi suspend les délais de transmission et d’examen des QPC
L'ordonnance 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel prévoit que la procédure de QPC est encadrée par des délais tant devant les juridictions des ordres administratifs et judiciaires que devant le Conseil constitutionnel. Ainsi, l'absence d'examen, dans un délai de 3 mois, des questions prioritaires soulevées dans le cadre d'un litige devant le Conseil d'État et la Cour de cassation entraîne le dessaisissement de ces juridictions, le Conseil constitutionnel en étant saisi d'office. L'épidémie de Covid-19 fait obstacle à ce que ces juridictions se réunissent en formation collégiale et, par conséquent, à ce que ces délais puissent être respectés.
Aussi, la loi organique d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19, adoptée le 21 mars 2020, prévoit que le délai de 3 mois de transmission des QPC par le Conseil d'État et la Cour de cassation ainsi que le délai de 3 mois dans lequel le Conseil constitutionnel statue sur une question transmise sont suspendus jusqu'au 30 juin 2020.
Les lois organiques ne pouvant être promulguées qu'après déclaration par le Conseil constitutionnel de leur conformité à la Constitution, le Premier ministre a saisi le Conseil constitutionnel le 23 mars 2020.
La loi est déclarée conforme à la Constitution
Le Conseil constitutionnel a écarté les objections soulevées concernant, notamment, le non-respect des dispositions de la Constitution présidant à l'adoption d'une loi organique. L'article 46, 2ème alinéa de la Constitution prescrit en effet un délai de 15 jours entre le dépôt du projet de loi organique et son adoption par la première assemblée saisie. Or, le projet de loi organique a été adopté le 18 mars 2020 en Conseil des ministres, déposé devant le Sénat le jour même, examiné en séance publique le lendemain et adopté en première lecture le 19 mars soit 24 heures après son dépôt.
Le Conseil constitutionnnel rejette l'argument d'inconstitutionnalité en décidant qu'au regard des « circonstances particulières de l’espèce, il n’y a pas lieu de juger que cette loi organique a été adoptée en violation des règles de procédure prévues à l’article 46 de la Constitution ».
Mais le Conseil constitutionnel ne s'interdit pas de statuer pendant cette période
Le Conseil constitutionnel écarte également l'objection selon laquelle la conséquence concrète de la loi organique serait de rendre en pratique inenvisageable, et en tout état de cause plus difficile, la contestation de la constitutionnalité de la déclaration de l’état d’urgence sanitaire pour 2 mois à compter du 24 mars 2020 par l’effet de la publication de la loi 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19, au moment où cet état est en vigueur.
En décidant que la loi organique « n'interdit pas l'exercice de ce recours ni n'interdit qu'il soit statué sur une QPC durant cette période », le Conseil constitutionnel ne s'interdit pas de statuer sur un éventuel recours.
Cécile HORREARD
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