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Quand un courriel de rappel à l’ordre ne constitue pas une sanction disciplinaire

Constitue un rappel à l’ordre et non un avertissement le courriel adressé au salarié par l’employeur, ne comportant aucune mesure à son l'encontre et lui demandant de faire preuve de respect et de cesser d’être agressif et de colporter des rumeurs auprès de la clientèle et des autres salariés.

Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-14.465 F-D, J. c/ Sté ACI-Global Fitness


Par Aliya BENKHALIFA
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©Getty Images

Reproches écrits adressés au salarié par l’employeur : simple rappel à l’ordre ou avertissement disciplinaire ? Si la distinction peut être délicate, elle n’est pas sans conséquence, car un avertissement est une sanction disciplinaire à part entière empêchant l’employeur de sanctionner à nouveau le salarié pour les mêmes faits fautifs, en application de la règle non bis in idem (Cass. soc. 13-11-2001 n° 99-42.709 FS-P).

Le Code du travail définit une sanction disciplinaire comme toute mesure autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération (C. trav. art. L 1331-1). La chambre sociale de la Cour de cassation admet généralement l’existence d’une sanction lorsque l'employeur adresse par écrit des reproches au salarié, l'invitant ou le mettant en demeure de modifier son comportement (notamment Cass. soc. 26-5-2010 n° 08-42.893 F-D ; Cass. soc. 3-2-2017 n° 15-11.433 F-D ; Cass. soc.10-2-2021 n° 19-18.903 FS-D).

Tel n’a cependant pas été le cas dans un arrêt du 20 mars 2024, s’agissant d’un courriel adressé par l’employeur au salarié au cours d’une mise à pied conservatoire, à propos duquel les juges du fond avaient relevé qu’il ne comportait aucune mesure à l’encontre de l’intéressé et qu’il se bornait à lui demander de faire preuve de respect à son égard, de cesser d’être agressif, de faire preuve de jugements moraux, de colporter des rumeurs et autres dénigrements auprès de la clientèle et des autres salariés. La Cour de cassation approuve la décision de la cour d’appel, laquelle, après avoir retenu que ce courriel constituait tout au plus un rappel à l’ordre, en avait déduit que le pouvoir disciplinaire de l’employeur n’était pas épuisé et que celui-ci avait donc pu par la suite notifier un licenciement pour faute grave motivé par un abus du salarié de sa liberté d’expression.

A notre avis :

Il n’est pas aisé d’identifier dans la jurisprudence de la Cour de cassation des critères permettant aux employeurs et aux juges du fond d’opérer une distinction entre les reproches écrits qualifiables de sanction et les autres : tantôt elle met en avant, pour retenir la qualification de sanction, l’existence de griefs précis (Cass. soc. 2-2-2022 n° 20-13.833 F-D : RJS 4/22 n° 171) ou encore certaines mentions de nature à avoir des conséquences sur la carrière du salarié (Cass. soc. 3-2-2017 n° 15-11.433 F-D), tantôt elle souligne l’absence de volonté de sanctionner pour exclure cette qualification (Cass. soc. 12-11-2015 n° 14-17.615 FS-PB).

Documents et liens associés

Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-14.465 F-D, J. c/ Sté ACI-Global Fitness

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