Le créancier bénéficiaire d'un cautionnement consenti par une personne physique, en garantie de la dette d'un débiteur principal mis ensuite en redressement judiciaire, peut prendre des mesures conservatoires sur les biens de la caution (C. com. art. L 622-28, al. 2 et 3, sur renvoi de art. L 631-14 pour le redressement judiciaire). Il doit introduire, dans le mois de leur exécution, une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire, à peine de caducité de ces mesures (C. exécution art. L 511-4 et R 511-7).
Il résulte de ces textes, juge la Cour de cassation, que le créancier peut obtenir un tel titre, même si sa créance contre la caution n'est pas exigible.
Par suite, La Haute Juridiction a cassé la décision d'une cour d'appel ayant rejeté la demande en paiement formée par un créancier qui avait fait inscrire une hypothèque conservatoire sur un bien de la caution aux seuls motifs qu'il n'existait aucun impayé avant l'ouverture du redressement judiciaire du débiteur principal, que, nonobstant toute clause contraire, le jugement qui ouvre une telle procédure ne rend pas exigibles les créances non encore échues lors de son prononcé et que la créance détenue par le créancier contre la caution n'était pas exigible.
A noter :
Le jugement ouvrant une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire suspend toute action contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie, jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation (C. com. art. L 622-28, al. 2).
La suspension des poursuites individuelles ne fait cependant pas obstacle à la prise de mesures conservatoires contre le garant (art. L 622-28, al. 3), dans les conditions posées aux articles R 511-1 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution. Le créancier doit notamment introduire une instance dans le mois qui suit l'exécution de la mesure, afin d'obtenir un titre exécutoire et d'empêcher que ladite mesure ne devienne caduque.
Si la Cour de cassation a, dans un premier temps, jugé que l'instance ainsi engagée était suspendue jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire du débiteur principal (Cass. com. 24-5-2005 nos 00-19.721 et 03-21.043 FS-PB : RJDA 10/05 n° 1154), elle autorise désormais le créancier à obtenir un titre exécutoire contre le garant alors même que la créance n'est pas encore exigible (Cass. com. 21-10-2020 n° 19-16.185 F-D ; Cass. com. 1-3-2016 n° 14-20.553 F-PB : RJDA 6/16 n° 464).
Ainsi, lorsque le créancier bénéficie d'une mesure conservatoire et qu'il introduit une instance pour en éviter la caducité, les juges du fond doivent prononcer la condamnation en paiement du garant. Mais la mise en œuvre du titre exécutoire ainsi obtenu sera suspendue au sort de la procédure collective (Cass. com. 1-3-2016 précité ; Cass. com. 2-6-2015 n° 14-10.673 FS-PB : RJDA 8-9/15 n° 591).