Selon la jurisprudence, lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’un contrat de sécurisation professionnelle (CSP), l’employeur doit en énoncer le motif économique dans un document écrit et porté à la connaissance du salarié au plus tard au moment de l’acceptation du dispositif (Cass. soc. 16-11-2016 n° 15-12.293 FS-PB ; Cass. soc. 27-5-2020 n° 18-20.153 F-PB).
Le motif doit être énoncé dans le document d'information sur le CSP, la lettre de licenciement à titre conservatoire que l'employeur peut remettre au salarié (Cass. soc. 17-3-2015 n° 13-26.941 FS-PB), ou tout autre document écrit remis ou adressé personnellement au salarié au plus tard lors de son acceptation du contrat (Cass. soc. 14-4-2010 n° 08-45.399 FS-PB et 09-40.987 FS-PB ; Cass. soc. 30-11-2011 n° 10-21.678 FS-PB).
Un affichage des documents relatifs à la procédure de licenciement économique dans les locaux de l'entreprise constitue-t-il un écrit porté à la connaissance du salarié, suffisant pour établir que le salarié a été informé du motif économique de la rupture ? La Cour de cassation répond à cette question dans deux arrêts du 23 novembre 2022.
L'affichage de documents ne permet pas de justifier de l'information personnelle des salariés
Après avoir adhéré à un CSP, deux salariés contestent leur licenciement devant le conseil de prud’hommes. Selon eux, leur employeur n’a pas satisfait à son obligation légale de les informer du motif économique à l’origine de la rupture de leur contrat de travail. La cour d'appel leur ayant donné raison, l'employeur s'est pourvu en cassation.
Selon lui, les salariés ont été informés du motif de leur licenciement par affichage dans l'entreprise de la note économique sur le projet de licenciement collectif qui décrivait les raisons de la réorganisation et les emplois supprimés, des procès-verbaux des réunions du comité d’entreprise (devenu CSE) relatives au projet de licenciement collectif et de la décision administrative d’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). Les salariés ont pu prendre connaissance de ces documents lorsqu’ils se sont rendus à l’entretien préalable à leur licenciement, comme l’établissent un procès-verbal d’huissier et le courrier électronique d’un salarié. Dès lors, selon l'employeur, il n’était pas nécessaire que l’information sur le motif économique de la rupture soit remise personnellement à chaque salarié.
Argument écarté par la Cour de cassation : le document écrit énonçant le motif économique de la rupture du contrat de travail doit être remis personnellement au salarié adhérant à une CSP, et un affichage dans l'entreprise ne peut pas s'y substituer. A défaut, la rupture est dépourvue de cause réelle et sérieuse.
A noter :
Cette solution n'est pas nouvelle : elle avait déjà été retenue à propos de la convention de reclassement personnalisé (Cass. soc. 12-6-2012 n° 10-14.632 FS-PB). La Cour de cassation la transpose au CSP.
Un manquement qui peut coûter cher à l’employeur
L’employeur doit donc être particulièrement vigilant lorsqu’il propose à un salarié d’adhérer au CSP : il doit non seulement veiller à informer le salarié en temps utiles sur le motif économique de la rupture mais il doit également veiller aux modalités de cette information et plus particulièrement aux modalités de remise de l’écrit informant le salarié de ce motif.
Faute de quoi, il pourra se voir condamner au versement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au remboursement des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, sous déduction de l’indemnité compensatrice de préavis versée par l’employeur à Pôle emploi et destinée au financement de ce dispositif. C'est ce que rappelle également la Cour de cassation dans ces arrêts, conformément à sa jurisprudence (Cass. soc. 31-3-2021 n° 19-24.390 F-D ; Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-21.066 F-D).
Documents et lien associés
Cass. soc. 23-11-2022 n° 21-17.483 F-D ; Cass. soc. 23-11-2022 n° 21-17.486 F-D