Le délai de recours devant le juge administratif à l’encontre d’une décision administrative est en principe de 2 mois (C. just. adm. art. R 421-1) mais il n’est opposable que si les voies et délais de recours ont été mentionnés dans la notification de la décision (C. just. adm. art. R 421-5). Par ailleurs, l’accusé de réception de la demande présentée initialement par l’administré doit indiquer si celle-ci peut faire l’objet d’une décision implicite et, si tel est le cas, mentionner les voies et délais de recours à l’encontre de cette décision (C. just. adm. art. R 112-5).
Un délai de recours d'un an au lieu de 2 mois lorsque les voies et délais de recours n'ont pas été indiqués
Pour éviter que, en l’absence de ces mentions, une décision puisse être contestée sans limite dans le temps, le Conseil d’État s’est fondé sur le principe de sécurité juridique pour juger que dans ce cas, le destinataire de la décision ne peut pas exercer de recours juridictionnel au delà d’un délai raisonnable qui en règle générale et sauf circonstances particulières, est limité à un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance : il s’agit de la jurisprudence Czabaj (CE ass. 13-7-2016 n° 387763) qui a été étendue au cas d’une décision implicite lorsqu’il est établi que l’intéressé en a eu connaissance (CE 18-3-2019 n° 417270).
A noter :
Cette jurisprudence a notamment été appliquée en matière de recours contre une décision administrative relative au licenciement d’un salarié protégé (CE 7-2-2018 nos 397246 et 397247).
Dans son avis rendu le 12 juillet 2023, publié au recueil Lebon, le Conseil d’État est amené à préciser l’articulation de cette jurisprudence avec la possibilité prévue par le Code de justice administrative d’exercer, dans le délai de recours contentieux, un recours administratif gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai (C. just. adm. art. L 411-2). Avant de statuer sur une demande d’annulation d’une décision prise par un maire, le tribunal administratif de Lyon avait en effet soumis à la Haute Juridiction administrative une question en deux temps : il souhaitait savoir si le délai raisonnable de recours consacré par la jurisprudence Czabaj pouvait être prorogé par la formation d’un recours administratif, même facultatif et, en cas de réponse positive, si l’absence de mention des voies et délais de recours dans la réponse à ce recours avait pour effet d’ouvrir un nouveau délai raisonnable de recours.
Le délai est prorogé en cas de recours gracieux ou hiérarchique
Le Conseil d’État déclare que la présentation d’un recours administratif, gracieux ou hiérarchique, dans le délai de recours contentieux a pour effet d’interrompre ce délai, y compris lorsqu’il s’agit du délai raisonnable posé par la jurisprudence Czabaj.
Deux cas de figure sont alors à distinguer, se divisant chacun en deux hypothèses :
- si le recours administratif présenté fait l’objet d’une décision explicite assortie des mentions sur les voies et délais de recours, un nouveau délai de recours de droit commun commence à courir à compter de la notification de cette décision. En l’absence de ces mentions, le délai applicable est le délai raisonnable établi par la jurisprudence Czabaj ;
- si le recours administratif fait l’objet d’une décision implicite de rejet, le délai de recours de droit commun recommence à courir dès la naissance de la décision implicite, si l'administration a accusé réception du recours et que cet accusé comporte les mentions prévues par l’article R 112-5 du Code de justice administrative. À défaut, l’intéressé dispose, pour présenter un recours contentieux, du délai raisonnable découlant de la jurisprudence Czabaj à compter du jour où il a eu connaissance de cette décision implicite de rejet.