À la suite de non-conformités affectant une maison individuelle construite dans le cadre d’un contrat de construction d’une maison individuelle (CCMI), le garant de livraison et le maître de l’ouvrage concluent une transaction. Aux termes de celle-ci, le garant prend en charge une somme correspondant au prix de la démolition-reconstruction de l’ouvrage.
Par subrogation aux droits du maître de l’ouvrage, le garant assigne l’assureur dommages-ouvrage (DO) en paiement sur le fondement de l’article 1792 du Code civil. L’assureur refuse sa garantie.
La cour d’appel valide ce refus.
La Cour de cassation confirme la décision et rejette le pourvoi du garant de livraison au motif que les défauts de conformité n’entrent pas, en l’absence de désordre, dans le champ d’application de l’article 1792 du Code civil.
L’arrêt précise qu’il en est également ainsi des défauts de conformité aux stipulations contractuelles qui ne portent pas, en eux-mêmes, atteinte à la solidité ou à la destination de l’ouvrage et qui n’exposent pas le maître de l’ouvrage à un risque de démolition à la demande d’un tiers, quand bien même la démolition-reconstruction de l’ouvrage serait retenue pour réparer ces non-conformités. La Cour de cassation retient que, si en l’espèce la nécessité de la démolition pouvait être nécessaire à la réparation du dommage, cette nécessité ne résultait pas d’un dommage qui compromettait la solidité de l’ouvrage ou qui le rendait, par lui-même, impropre à sa destination. Dans ces conditions, l’assureur DO ne pouvait pas être tenu de garantir les travaux de mise en conformité.
A noter :
1. La garantie décennale visée par l’article 1792 du Code civil ne s’applique que si le dommage compromet la solidité de l’ouvrage ou s’il rend celui-ci impropre à sa destination. Il faut un désordre : la non-conformité, même aux normes relatives à la construction, est une faute, non un dommage au sens de ce texte. Elle ne suffit pas à engager la responsabilité décennale de son auteur (Cass. 3e civ. 20-11-1991 n° 89-14.867 P : Bull. civ. III n° 278 ; Cass. 3e civ. 10-6-2021 n° 20-15.277 FS-P : BPIM 4/21 inf. 263). Exceptionnellement, toutefois, certaines non-conformités sont prises en compte comme un dommage en raison du risque certain d’atteinte à la solidité de l’ouvrage ou du risque d’impropriété à sa destination. Il en est ainsi de l’inobservation des règles parasismiques (notamment, Cass. 3e civ. 19-9-2019 n° 18-16.986 FS-PBI : BPIM 6/19 inf. 402). Dans ce cas, le dommage, quoique futur, est considéré d’ores et déjà comme certain car il y a un risque de démolition. Il a été jugé cependant que la démolition-reconstruction peut être évitée si une autre solution efficace est concevable pour procurer au maître de l’ouvrage une réparation intégrale (Cass. 3e civ. 14-2-2019 n° 18-11.836 FS-D : RDI 2019 p. 219).
2. L’assurance DO couvre les travaux de réparation des désordres engageant la responsabilité décennale des constructeurs (C. ass. art. L 242-1), c’est-à-dire, en pratique, ceux qui rendent l’ouvrage impropre à sa destination ou en compromettent la solidité (Cass. 3e civ. 3-3-2010 n° 07-21.950 FS-PB : BPIM 3/10 inf. 243). Le seul défaut de conformité n’étant pas un désordre, il ne suffit donc pas à engager la garantie de l’assureur. L’arrêt le confirme. Le moyen soutenait cependant que la réparation du dommage résultant des non-conformités constatées impliquait la démolition-reconstruction de l’ouvrage, ce qui suffisait, selon lui à caractériser un désordre décennal. L’arrêt estime que la démolition en tant que modalité de la réparation n’entre pas dans le champ d’application de l’article 1792 du Code civil. Il réserve toutefois le cas où le maître de l’ouvrage est exposé à un risque de démolition à la demande d’un tiers. On notera que la question de la garantie décennale s’est posée en cas de non-conformité aux règles limitant la propriété : l’implantation, même partielle, sur le terrain d’autrui expose le maître de l’ouvrage au risque de démolition à la demande du voisin et peut déclencher la garantie décennale (Cass. 3e civ. 27-4-1994 n° 92-14.854 : RGAT 1994 p. 820 note H. Périnet-Marquet ; Cass. 3e civ. 18-3-2021 n° 19-21.078 F-D : BPIM 3/21 inf. 195 ; voir sur ce point, B. Boubli, La responsabilité et l’assurance des constructeurs, 2e éd. n° 25). Il est probable qu’il en serait de même en cas de non-conformité aux règles d’urbanisme impératives.
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