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Le délai de 10 ans de l’article 1792-4-3 du Code civil est un délai de forclusion

Le délai de 10 ans prévu par l’article 1792-4-3 du Code civil pour agir en responsabilité contre un constructeur est un délai de forclusion et la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit n’interrompt pas le délai.

Cass. 3e civ. 10-6-2021 n° 20-16.837 FS-PR, Sté Axa France IARD


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©iStock

Des travaux de réfection d’une terrasse sont confiés à une entreprise en 2003. Se plaignant de désordres, le maître de l’ouvrage obtient en 2011 un accord de l’entreprise pour leur réparation. Ces désordres persistant, il engage une action en indemnisation contre l’entreprise en 2016.

La cour d’appel condamne l’entreprise « in solidum » avec son assureur. Elle retient l’existence de désordres intermédiaires et écarte la forclusion invoquée par l’assureur. Ce dernier soutenait que le délai de 10 ans de l’article 1792-4-3 du Code civil était un délai de forclusion qui ne pouvait pas être interrompu par la reconnaissance de responsabilité.

Cassation : en alignant quant à la durée et au point de départ du délai le régime de la responsabilité contractuelle de droit commun sur celui de la garantie décennale, dont le délai est un délai d’épreuve, le législateur a entendu harmoniser les deux régimes de responsabilité.  Il en résulte que le délai de 10 ans pour agir sur le fondement de l’article 1792-4-3 du Code civil est un délai de forclusion qui n’est pas, sauf dispositions contraires, régi par les dispositions concernant la prescription : la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit n’interrompt pas le délai de forclusion.

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A noter :

Cet arrêt, destiné à figurer au rapport de la Cour de cassation, est important. Avant la loi 2008-561 du 17 juin 2008, la prescription de l’action en garantie décennale était interrompue soit par une citation en justice (C. civ. art. 2244 ancien), soit par une reconnaissance de responsabilité (C. civ. art. 2248 ancien). Cette interruption a été retenue en jurisprudence.

La question se pose différemment depuis la loi de 2008. Si les articles 2241 et 2244 anciens du Code civil visent l’interruption tant du délai de prescription que du délai de forclusion par la demande en justice, l’article 2240 nouveau n’assigne un effet interruptif à la reconnaissance de responsabilité qu’en matière de prescription. En outre, ce texte figure au titre XX du Code civil, dont l’article 2220 précise qu’il ne régit pas le délai de forclusion, sauf dispositions contraires (celles des articles 2241 et 2244, notamment). On s’est alors demandé si le délai de forclusion était ou non susceptible d’être interrompu par une reconnaissance de responsabilité. L’opinion, quoique nuancée, était que la jurisprudence l’admettrait comme pour le passé dans les délais préfix, comme c’est le cas en matière décennale ou biennale (P. Malinvaud, « Les difficultés d’application des règles nouvelles relatives à l’interruption et à la suspension des délais »  : RDI 2010 p. 105 ; Dalloz-Action, Droit de la construction 2018-2019 n° 475-243).

L’arrêt commenté montre que la jurisprudence qui s’est constituée sous l’empire des anciens textes n’est probablement plus d’actualité. L’arrêt, certes, se prononce sur le délai de la responsabilité de droit commun des constructeurs prévu par l’article 1792-4-3 du Code civil introduit par la loi de 2008 car le litige concernait des désordres intermédiaires. Mais il aligne son régime sur le délai des garanties légales (« le législateur a entendu harmoniser ces deux régimes de responsabilité ») et l’on peut penser que la reconnaissance de responsabilité n’interrompt pas le délai de garantie décennale ou biennale.  Si tel est le cas, deux situations sont à tout le moins concevables à propos de celui qui a accepté volontairement de procéder aux réparations : ou bien le délai de 10 ans est en cours et il n’y a pas de difficulté sérieuse, ou bien il ne l’est plus et c’est la prescription de l’action en exécution de l’engagement qui devrait avoir vocation à s’appliquer (5 ans en application de l’article 2224 du Code civil). À suivre…

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne