Le directeur d’un centre hospitalier saisit le juge aux affaires familiales afin d’obtenir condamnation des obligés alimentaires d’une de ses résidentes au paiement des frais de séjour. Le fils, reconnu débiteur d’aliments, conteste toutefois le montant mis à sa charge. En effet, pour le fixer, la cour d’appel a tenu compte des revenus de son épouse, codébitrice d’aliments à l’égard de sa belle-mère.
Cassation. La dette du débiteur d’aliments est une dette personnelle dont le montant est fixé eu égard à ses uniques ressources (C. civ. art. 205, 206 et 208). Or, seul le fils a été attrait à l’instance. Par conséquent, il ne peut pas être tenu compte des revenus de son épouse pour fixer le quantum de l’obligation pesant sur le couple. Ils sont pris en compte dans la seule mesure où ils réduisent les charges de son mari.
A noter :
La Haute Juridiction opère un rappel du principe selon lequel la dette du débiteur d'aliments étant une dette personnelle, dont le montant doit être fixé eu égard à ses ressources, les revenus du conjoint du débiteur ne peuvent être pris en considération que dans la mesure où ils réduisent les charges de celui-ci (Cass. 1e civ. 25-4-2007 n° 06-12.614 FS-PB : AJ famille 2007 p. 269 obs. F. Chénedé, RTD civ. 2007 p. 558 obs. J. Hauser). Dans cette précédente affaire, le créancier d’aliments avait également réservé son action contre son fils. Par conséquent, le juge ne pouvait pas prendre en compte l’ensemble des revenus du foyer pour fixer le montant de la dette d’aliments.
Quelles sont les principales caractéristiques du recours en aliments en présence d’une pluralité de débiteurs ? Il est loisible au créancier d’aliments d’exercer son action contre un, plusieurs ou l’ensemble des débiteurs d’aliments (Cass. 1e civ. 25-4-2007 n° 06-12.614 FS-PB, précité). En l’espèce, le directeur du centre hospitalier aurait également pu poursuivre la belle-fille en sa qualité d’obligée alimentaire (C. civ. art. 206). Par ailleurs, sous réserve de la primauté du devoir de secours entre époux sur l’obligation alimentaire ordinaire et de la subsidiarité de celle des ascendants autre que les père et mère envers leurs descendants ou de celle des parents biologiques en cas d’adoption simple, il n’y a pas de hiérarchie à respecter entre les débiteurs d’aliments au sens strict (Cass. 2e civ. 2-1-1929, Époux Giraud c/ Dame Laprugne-Giraud : DP 1929, I, p. 137 note R. Savatier, GAJC, Dalloz 13e éd. 2015, n° 57-58). Pour autant, il n’existe pas de solidarité entre eux (Cass. 1e civ. 3-3-1987 n° 85-13.986 : Bull. civ. I n° 80 ; Cass. 1e civ. 22-11-2005 n° 02-11.534 FS-PB : RTD civ. 2006. 104, obs. J. Hauser). Par conséquent, le montant de la dette alimentaire de chacun doit être fixé en ayant égard à ses ressources personnelles (Cass. 1e civ. 5-2-1991 n° 89-15.412 : Bull. civ. I n° 42). En l’espèce, si la belle-fille avait également été poursuivie, elle aurait été débitrice ainsi que son époux d’une dette d’aliments qui lui aurait été personnelle, sans qu’il soit possible de les condamner à une dette commune fixée en faisant la somme de leurs revenus respectifs. Enfin, la dette d’aliments n’étant pas conjointe, le créancier peut réclamer à l'un quelconque de ses débiteurs d'aliments l'intégralité dont il a besoin, dans la limite des ressources du débiteur (Cass. civ. 27-11-1935, Époux Gibeaux c/ Varin : DP 1936, I, p. 25, note A. Rouast).