Depuis le 1er juin 2017, les dirigeants des sociétés de grande taille doivent, sous peine de sanctions administratives et pénales, prendre des mesures destinées à prévenir et à détecter les faits de corruption ou de trafic d'influence (Loi 2016-1691 dite « Sapin 2 » du 9-12-2016 art. 17 : BRDA 1/17 inf. 19 nos 2 s.).
La loi Sapin 2 vise les dirigeants suivants : les présidents, directeurs généraux et gérants (art. 17, I-al. 1) ; selon les attributions qu'ils exercent, les membres du directoire des sociétés anonymes (SA) (art. 17, I-2°). Cette énumération soulève plusieurs questions auxquelles répond l'Association nationale des sociétés par actions (Ansa).
1. En cas de dissociation des fonctions entre un président et un directeur général de SA, le président est-il tenu de mettre en place des mesures anti-corruption ?
L'obligation concerne le directeur général (voire le directeur général délégué) mais elle ne pèse pas concurremment sur le président. En effet, la nature de cette obligation relève de la responsabilité de la direction générale et non du président, seulement tenu de veiller au bon fonctionnement des organes sociaux (C. com. art. L 225-51). En outre, l’article 17, I précité vise les « présidents » en général et non le « président du conseil d’administration ». Celui-ci n'est donc pas couvert par l’appellation de « président » (pas plus que le président du conseil de surveillance), qui correspond au seul président de société par actions simplifiée (SAS).
2. Qu'en est-il dans les SA à directoire ?
L'article 17, I-2° vise les membres du directoire « selon les attributions qu'ils exercent ». Leur responsabilité dépend donc de l’étendue des attributions qu’ils ont reçues. En l’absence de répartition des pouvoirs entre les membres du directoire, la responsabilité du directoire reste collégiale puisque, à l'instar du directeur général de SA à conseil d'administration (C. com. art. L 225-56, I), le directoire dans son ensemble est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société (art. L 225-64).
Le cas des sociétés à directoire est traité spécifiquement à l'article 17, I-2° ; ni le président du directoire, ni le directeur général (habilité à représenter la société à l'égard des tiers) ne sont donc concernés en tant que tels par l'énumération de l'article 17, I-al. 1 relatif aux « présidents » et « directeurs généraux ». Par ailleurs, compte tenu de la fonction de contrôle du conseil de surveillance, son président n'est pas non plus tenu de mettre en place des mesures anti-corruption.
3. Dans la SAS, outre le président, quels dirigeants sont concernés ?
Pour la majorité du comité juridique de l'Ansa, l'obligation s'applique non seulement au président mais aussi aux directeurs généraux, expressément visés par l'article 17, I-al. 1, quand bien même les statuts ne leur auraient pas confié le soin de mettre en place les mesures. Pour déterminer le dirigeant responsable, il convient de se référer aux clauses statutaires relatives à la répartition des pouvoirs entre le président et le directeur général. Le directeur général délégué participant à la direction générale, il doit être assimilé au directeur général pour la mise en place des mesures.
Les autres dirigeants prévus par les statuts (par exemple, les membres d'un comité) ne sont pas concernés, faute d'être cités par le texte.
Voir aussi : Quelle est l’étendue du contrôle exercé par l’Agence française anticorruption ?