Lorsque le comité d’entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, il peut demander à l’employeur de lui fournir des explications. Si la réponse de l’employeur est insuffisante ou confirme le caractère préoccupant de la situation, le comité déclenche une procédure d’alerte et peut obtenir l'assistance d’un expert-comptable de son choix rémunéré par l’entreprise (C. trav. art. L 2323-78 et L 2323-79 devenus L 2323-50 et L 2323-51).
refus de l’employeur de répondre aux questions sur la société mère et le groupe
En l’espèce, une réunion extraordinaire du comité d’entreprise est organisée au cours de laquelle celui-ci demande des explications à l’employeur sur la situation économique de l’entreprise qu’il estime préoccupante. Ce dernier apporte des réponses à toutes les questions relatives à la stratégie de l’entreprise, mais refuse de répondre à celles visant la société mère estimant qu’elles dépassent le cadre du droit d’alerte exercé à son encontre.
Face à ce refus, le comité décide de poursuivre la procédure d’alerte et de recourir à un expert-comptable. L’employeur saisit alors le tribunal de grande instance d’une demande de suspension de la procédure d’alerte.
Refus en l'espèce injustifié
La cour d’appel de Rennes constate que la filiale est dépendante de la société mère et que sa situation financière est extrêmement délicate : la société mère, qui détient intégralement son capital social, a dû lui apporter mensuellement depuis le début de l’année entre 350 000 et 400 000 € afin de lui permettre de faire face au paiement des salaires et à la trésorerie.
Le juge rennais estime que cette situation impose au comité d’entreprise d’obtenir des informations sur la stratégie de la société mère à l’égard de la filiale. Il décide en conséquence que l’absence de réponse de l’employeur aux questions posées par le comité s’analyse en une insuffisance de réponse permettant à ce dernier de recourir à un expert.
La Cour de cassation approuve : la décision de la cour d’appel est justifiée car elle a, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, retenu que la situation financière délicate de la filiale et sa situation de dépendance à l’égard de sa mère rendaient indispensable l’obtention par le comité d’entreprise des informations sur la stratégie de cette dernière à l’égard de sa filiale.C’est donc aux juges du fond qu’il revient d’apprécier, au cas par cas, si le comité d’entreprise peut dans le cadre de son droit d’alerte économique poser des questions sur la stratégie de la société mère à l’égard de sa filiale.
Valérie MAINDRON
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Social no 9465