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Droit du père biologique et irrecevabilité de son intervention à la procédure d'adoption de l'enfant

Les juges doivent rechercher si l'irrecevabilité de l'intervention du père biologique à la procédure d'adoption de son enfant résultant de la décision de placement constitue une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale.

Cass. 1e civ. 27-1-2021 no 19-15.921 FS-PB


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Une enfant naît sous X. Le conseil de famille des pupilles de l'État décide de son placement en vue de son adoption. Le père de naissance entreprend des démarches auprès du procureur de la République pour retrouver l'enfant. Il la reconnaît quatre mois après la décision de placement. Le couple d'adoptants ayant déposé une requête afin que soit prononcée l'adoption plénière de l'enfant, le père biologique intervient volontairement à l'instance. La cour d'appel déclare son intervention irrecevable et annule l'acte de reconnaissance. Il a, certes, démontré sa détermination, par de nombreuses démarches engagées pendant les mois qui ont suivi la naissance de l'enfant, à faire reconnaitre sa paternité. Mais il ne justifie pas d'une qualité à agir dès lors que le placement en vue de l'adoption fait échec à toute déclaration de filiation et à toute reconnaissance (C. civ. art. 352, al. 1).

La Cour de cassation censure l'arrêt. La cour d'appel aurait dû rechercher si l'irrecevabilité de l'action du père de naissance, qui n'avait pu en temps utile et sans que cela puisse lui être reproché, faire valoir ses droits au cours de la phase administrative de la procédure, ne portait pas, eu égard aux différents intérêts en présence, une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale en ce qu'elle interdisait l'examen de ses demandes.

À noter : Récemment, a été déclarée conforme à la Constitution la règle selon laquelle le placement à l'adoption d'un enfant né sous X fait échec à la reconnaissance de paternité, et ce même si celle-ci intervient avant le prononcé de l'adoption (Cons. const. 7-2-2020 no 2019-826 QPC). Mais, comme le rappelle ici la Cour de cassation, si l'action du père biologique apparaît comme irrecevable, faute de qualité à agir, aucun lien de filiation ne pouvant être établi entre eux (CPC art. 329 et C. civ. art. 352, al. 1), il appartient néanmoins au juge de procéder, au regard des circonstances de l'espèce, à une mise en balance des intérêts en présence : celui de l'enfant, qui prime, celui des parents de naissance et celui des parents adoptants. Ceci afin de vérifier si les dispositions de droit interne ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale du père biologique (Conv. EDH art. 8).

Sur le fond, rappelons que l’intérêt de l'enfant reste supérieur et qu'il réside dans le fait que son adoption intervienne dans un délai qui ne soit pas de nature à compromettre son développement ; de plus, le législateur a entendu garantir à l'enfant, déjà remis aux adoptants, un environnement familial stable (Cons. const. 7-2-2020 no 2019-826 QPC). En l'espèce, l'enfant a été adoptée à l'âge de quatre mois et avait quatre ans lors de la décision commentée. Les juges d'appel ont d'ailleurs retenu qu'il était de l'intérêt de l'enfant de voir prononcer son adoption par le couple adoptant avec lequel elle avait noué des liens affectifs forts qu'il serait traumatisant de rompre brutalement. À moins d'un retournement de situation, les chances du père d'obtenir le rétablissement d'un lien de filiation avec sa fille devant la cour d'appel de renvoi semblent minces.

Florence GALL-KIESMANN

Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Droit de la famille n° 29685

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne