Était en cause en l'espèce, l'élection des délégués du personnel dans une entreprise de moins de 26 salariés et donc d'un seul titulaire et d'un seul suppléant. Au premier tour, le quorum n'avait pas été atteint et, au second tour, deux salariés ayant présenté individuellement leur candidature avaient été élus. Le syndicat ayant présenté des candidats au premier tour (en principe maintenus au second) demandait l’annulation de l'élection de ces deux salariés. Il invoquait notamment le fait que l'employeur avait édité un seul bulletin de vote comportant le nom des deux candidats pour l'élection du titulaire comme pour l'élection du suppléant, les électeurs étant alors invités à cocher une case afin de déterminer celui pour lequel ils votaient. Selon le syndicat, une telle irrégularité devait être jugée contraire aux principes généraux du droit électoral et, dès lors, entraîner par elle-même l'annulation des élections.
Le tribunal avait débouté le syndicat de sa demande sans répondre précisément à ce grief. Son jugement est cassé pour défaut de réponse à conclusions. La Cour de cassation considère que l'édition par l'employeur d'un bulletin unique pour deux candidats individuels, constituant juridiquement chacun une liste, est une irrégularité contraire à un principe général du droit électoral justifiant à elle seule l'annulation des élections.
La Cour de cassation, poursuivant sa ligne jurisprudentielle particulièrement exigeante quant au respect du formalisme électoral, consacre ainsi un nouveau principe général du droit électoral.
A notre avis : si le procédé utilisé par l'employeur est sans doute mal adapté au vote physique traditionnel lorsque le nombre des sièges à pourvoir est important et que les listes en présence sont nombreuses, on peut se demander s’il heurte pour autant un principe général du droit électoral. Aucun texte n’interdit une telle pratique. D’ailleurs, même si la technique n'est pas expressément prévue par le Code électoral, elle n'est déjà pas incompatible avec le scrutin plurinominal gouvernant l'élection des conseillers municipaux dans les communes de moins de 1 000 habitants. Elle a même été retenue pour le vote par correspondance lors des dernières élections de décembre 2016 et janvier 2017 dans les très petites entreprises où chaque électeur disposait d'un bulletin unique comportant l'ensemble de toutes les candidatures et devait noircir la case correspondant à celle des candidats ayant ses faveurs. Certes le choix ne portait pas sur des personnes physiques à élire mais sur des organisations syndicales à « plébisciter ». Il n'empêche qu'un choix exprimé par « cochage » sur une liste comportant des candidatures multiples n'est pas prohibé.
Pour en savoir plus sur les modalités de vote aux élections professionnelles : Mémento Social nos 63010 s.