L’associé d’une société civile immobilière (SCI) propriétaire d’un terrain se retire de celle-ci et un expert chargé d’évaluer les parts de l’associé à racheter par la SCI fixe cette valeur en fonction de la constructibilité d’un lotissement sur le terrain sans envisager l’hypothèse où le lotissement ne serait pas construit.
Jugé que le rapport d’expertise était, non pas incomplet comme le soutenait l’associé, mais entaché d’une erreur grossière. Cette erreur résultait du choix fait par l'expert de restreindre son évaluation à la seule hypothèse de la construction d'un lotissement sur le terrain appartenant à la société, après avoir pourtant constaté que plusieurs réserves sérieuses pesaient sur la mise en valeur du terrain ; toutes les réserves émises par l'expert dans son rapport montraient que l'élaboration même d'un projet de construction de lotissement était conditionnée à une recherche préalable de faisabilité, quand bien même le terrain serait situé en zone constructible, de sorte que l'expert aurait dû, pour éclairer complètement le tribunal qui l’avait nommé, fournir une estimation des actifs de la société dans l'hypothèse où le lotissement ne serait pas construit ; cette erreur grossière affectait non pas le fond des conclusions de l'expert mais le point de vue unilatéral qu'il avait adopté malgré l'existence d'éléments concrets commandant de chiffrer la situation alternative de non-construction du lotissement.
Par suite, la demande de l’associé tendant à l'adoption des conclusions du rapport et à la fixation du prix des parts sociales à la valeur retenue par l'expert devait être rejetée.
A noter :
On sait que les conclusions de l’expert désigné pour fixer le prix de cession ou de rachat des parts ou actions d’un associé s’imposent aux parties et au juge, sauf en cas d'erreur grossière de l’expert (jurisprudence constante, que l’expert soit désigné en application de l’article 1592 ou de l’article 1843-4 du Code civil). L’erreur grossière est rare en jurisprudence, d’où l’intérêt de l’arrêt ci-dessus.
La qualification d’erreur grossière a également été retenue dans un cas où un expert chargé de fixer le prix des parts d'un associé se retirant d'une SCI propriétaire d'un ensemble immobilier avait évalué l’un des bâtiments, vétuste, en fonction de sa future constructibilité sur une surface (plus de 3 000 m²), très largement supérieure aux précédentes bases évoquées dans son rapport (entre 2 300 et 2 700 m²), sans s'en expliquer ; après avoir revu un architecte, il avait ensuite réduit la base constructible sans indiquer une nouvelle surface qui aurait permis de procéder à une nouvelle valorisation du bien, de sorte que la valeur des parts sociales, en partie fixée en fonction de la constructibilité future de l'ensemble immobilier à détruire, n'était que pure hypothèse (CA Paris 22-10-2013 n° 10/17138 : RJDA 10/14 n° 771).
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