L'associé unique d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) confie à un expert-comptable une mission d'assistance juridique et fiscale comprenant le soin de notifier à l'administration fiscale l'option de l'EURL à l'impôt sur les sociétés (IS). Contestant avoir reçu cette notification, l'administration applique à l'EURL les règles d'assujettissement de droit commun à l'impôt sur le revenu et redresse l'associé unique en conséquence en taxant à son nom le résultat d'ensemble de la société. Reprochant à l'expert-comptable d'avoir manqué à ses obligations, l'associé lui demande réparation de son préjudice.
La cour d'appel de Paris juge que l'expert-comptable, qui a notifié l'option à l'IS par lettre simple et non par courrier recommandé, aurait dû se ménager la preuve de son envoi mais elle rejette la demande de réparation car l'associé, qui réclame à l'expert l'intégralité du montant du redressement, n'a pas établi la réalité de son préjudice (CA Paris 14-4-2016 n° 15/11628, voir La Quotidienne du 7 juin 2016).
La Cour de cassation approuve : l'expert doit réparer le préjudice résultant de sa seule défaillance dans l'exécution des diligences lui incombant auprès de l'administration fiscale ; s'il avait commis une faute en ne notifiant pas l'option par lettre recommandée, il appartenait à l'associé, qui ne l'avait pas fait, de prouver le préjudice résultant de cette faute en distinguant la part du redressement exclusivement imputable à l'absence d'option à l'IS de celle consécutive au rejet par l'administration fiscale de certaines écritures comptables passées par l'EURL et en précisant l'impôt qui aurait dû être acquitté par celle-ci et qui aurait réduit d'autant les bénéfices distribués imposables.
A noter : en comptabilisant en l'espèce certaines écritures rejetées par la suite par l'administration fiscale, l'associé unique avait contribué à la réalisation de son propre préjudice. Dans un tel cas, où le préjudice du client trouve en partie son origine dans une faute qu'il a commise, il y a partage de responsabilité entre celui-ci et l'expert. Il en est par exemple ainsi lorsqu'un redressement fiscal d'une SARL ayant confié à un expert-comptable la tenue de sa comptabilité et l'établissement de ses déclarations de TVA résultait tant de l'absence de dépôt des déclarations, lequel incombait au gérant de la SARL, que de l'absence de préparation des déclarations par l'expert-comptable (Cass. com. 20-9-2016 n° 15-13.342 F-D : RJDA 1/17 n° 27).