Un employeur, confronté au dénigrement de sa politique tarifaire par l'un de ses directeurs d'agence, décide de le licencier pour faute lourde. Le directeur écarté conteste son licenciement, notamment la qualification de faute lourde retenue par son employeur. Celle-ci est maintenue par les juges d'appel qui relèvent le caractère préjudiciable du comportement du salarié et son niveau élevé de responsabilités, la combinaison de ces deux éléments permettant, selon eux, de présumer l'intention de nuire.
La cour d'appel constate en effet qu'en critiquant les tarifs pratiqués par l'entreprise auprès des clients, le salarié a agi de façon déloyale. Compte tenu de ses responsabilités de directeur d'agence et de sa qualification initiale d'expert-comptable, l'intéressé ne pouvait ignorer les conséquences préjudiciables de ses propos et a donc agi avec l'intention de nuire.
Cette démonstration ne convainc pas la Cour de cassation qui, à l'occasion de l'affaire, rappelle les principes régissant la qualification de faute lourde. Celle-ci est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif. Pour la Haute juridiction, la volonté de nuire ne peut pas résulter de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise.
La Cour de cassation considère néanmoins que les faits reprochés au salarié caractérisent une faute grave. Cette disqualification de faute lourde en faute grave est sans conséquence sur les droits du salarié à indemnisation : ce dernier est privé du bénéfice de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de licenciement.
Rappelons que, jusqu'au 4 mars 2016, la faute lourde avait pour effet de le priver de l'indemnité compensatrice de congés payés. Mais cette sanction spécifique a été déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel (Cons. const. 2-3-2016 n° 2015-523). La Cour de cassation maintient son contrôle sur la qualification de la faute lourde en dépit de la suppression de cette sanction spécifique. Témoigne de cette volonté de la Cour le visa choisi pour l'arrêt du 8 février 2017 qui renvoie à la décision du Conseil constitutionnel.
A noter : La distinction entre la faute grave et la faute lourde continue d'avoir des conséquencess'agissant de la possibilité de licencier un salarié gréviste ou d'engager la responsabilité pécuniaire du salarié.
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Social nos 47140 s.