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Fraude du débiteur autorisant la reprise des poursuites contre lui après la liquidation judiciaire

Le débiteur qui a sciemment caché au liquidateur judiciaire une créance et l’instance en cours dont elle fait l’objet et n’a pas informé son créancier de la procédure collective s’expose à une reprise de l’action du créancier contre lui après la liquidation judiciaire.

Cass. com. 11-9-2024 n° 23-11.333 F-D, Exploitation de la Planchette c/ X.


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©Getty Images

Lorsque la liquidation judiciaire d’une entreprise est clôturée pour insuffisance d'actif, les créanciers ne recouvrent pas l'exercice individuel de leurs actions contre l’entreprise (C. com. art. L 643-11, I). Toutefois, en cas de fraude de cette dernière à l'égard d'un ou de plusieurs créanciers, le tribunal autorise la reprise des actions individuelles de tout créancier à l'encontre du débiteur (art. précité, IV).

Un artisan est mis en redressement judiciaire puis, après résolution de son plan de redressement, en liquidation judiciaire, procédure qui est clôturée pour insuffisance d’actif. Un exploitant agricole demande alors à reprendre son action contre l’artisan, qui, avant d’être mis en redressement judiciaire, lui a livré une salle de traite défectueuse.

Il est fait droit à cette demande. En effet, l’artisan qui avait poursuivi sous une autre forme, après la clôture de sa liquidation judiciaire, la même activité que celle à l'origine du litige et qui avait assisté onze jours avant sa mise en liquidation judiciaire, à une réunion d'expertise relative au litige l'opposant à l’exploitant, avait intentionnellement dissimulé au liquidateur judiciaire la créance de l’exploitant et l'existence de l'instance en cours initiée par celui-ci à son encontre et s'était de même abstenu d'informer le créancier qui l'avait assigné en responsabilité de l'ouverture de sa liquidation judiciaire.

A noter :

1° La fraude du débiteur, qui permet à un créancier d’agir contre ce dernier après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, ne suppose pas la caractérisation de l’intention du débiteur de nuire au créancier ; la conscience de causer un préjudice à ce dernier suffit (Cass. com. 26-6-2019 n° 17-31.236 FS-PB : RJDA 1/20 n° 32).

Rappelons que le débiteur, partie à une action en justice, doit informer le créancier de l’ouverture de la procédure collective dans les 10 jours de celle-ci (C. com. art. L 622-22) ainsi que les organes de la procédure collective de l’instance en cours (art. L 622-6, al. 2). Tout comme il doit fournir à ces derniers la liste de ces créanciers (art. précité). Le seul défaut de remise de cette liste n’est pas suffisant pour établir l’existence d’une fraude (Cass. com. 12-7-2011 n° 10-21.726 F-D), ce qui vaut aussi pour l’omission d’un créancier sur cette liste. Mais, dans l’affaire commentée, l’omission s’accompagnait de l'abstention délibérée du débiteur à ses autres obligations.

2° Depuis la séparation légale des patrimoines professionnel et personnel de l’entrepreneur individuel, la procédure collective dont celui-ci fait l’objet peut ne concerner que son patrimoine professionnel. Dans les mêmes conditions que celles précitées (clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif et fraude de l’entrepreneur à l'un de ses créanciers), le tribunal peut autoriser tout créancier à poursuivre le patrimoine personnel (art. L 643-11, VI). Applicables dans les procédures ouvertes depuis le 15 mai 2022, ces dispositions ne l’étaient pas ici, la liquidation judiciaire de l’artisan étant bien antérieure à cette date.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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