Rappelons que les bénéficiaires effectifs d'une société non cotée à déclarer au registre du commerce et des sociétés sont les personnes physiques qui soit détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société, soit exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur la société (C. mon. fin. art. R 561-1).
Dans ses fiches pratiques d'aide à la déclaration des bénéficiaires, disponibles sur le site internet Infogreffe, le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (qui représente la profession) envisage le cas d'un groupe familial dont les membres (parents et enfants ; ascendants ou frères et sœurs des parents) détiennent ensemble une participation majoritaire dans la société, sans qu'aucun d'eux ne dépasse individuellement les 25 % du capital ou des droits de vote. Selon le Conseil, ces membres sont tous bénéficiaires effectifs au titre des « autres moyens de contrôle » de la société si, dans les faits, ils agissent de concert et déterminent ensemble les décisions prises en assemblée et ce, même en l'absence d'accord exprès conclu entre eux.
Le comité juridique de l'Association nationale des sociétés par actions (Ansa) conteste cette analyse (Communication Ansa, comité juridique n° 18-017 du 4-4-2018), estimant que l'agrégation des participations des membres semble « abusif » en l'absence d'accord formalisé entre ceux-ci. En effet, la directive européenne antiblanchiment du 20 mai 2015, sur le fondement de laquelle a été prise la réglementation sur les bénéficiaires effectifs, fait présumer qu'un associé détenant plus de 25 % du capital ou des droits de vote est le bénéficiaire de la société, mais elle ne présume pas de l'existence d'un concert entre les membres d'une famille (comprise, selon le comité, dans son sens « nucléaire » : le couple et leurs enfants).
Nous partageons d'autant plus le point de vue de l'Ansa que l'article L 233-10, I du Code de commerce, auquel se réfère le Conseil national des greffiers, qualifie de concertistes les personnes ayant « conclu un accord » en vue d'exercer des droits de vote pour mettre en œuvre une politique commune vis-à-vis de la société.
L'Ansa distingue néanmoins selon que les enfants sont mineurs ou non. Pour la majorité du comité juridique, il semble « prudent » de regrouper la participation des enfants mineurs avec celle de leurs parents « du fait d'une présomption de contrôle ». En revanche, lorsque les enfants sont majeurs, il n'y a aucune raison de présumer l'existence d'un accord entre eux et leurs parents. Entre les parents, ajoute l'Ansa, la participation doit être regroupée seulement si les titres sont des biens relevant de la communauté.