Lorsqu’un litige relevant d’une convention d’arbitrage est porté devant une juridiction de l’Etat, celle-ci se déclare incompétente, sauf si le tribunal arbitral n’est pas encore saisi et si la convention d’arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable (CPC art. 1448 ; effet négatif du principe « compétence-compétence »).
Un franchisé, soutenant être victime de pratiques anticoncurrentielles de la part du franchiseur, le poursuit devant un tribunal de commerce, bien que le contrat de franchise comporte une clause d'arbitrage. Il prétend qu’il a des difficultés financières et que l’état d’impécuniosité d’une partie à un contrat contenant une clause d'arbitrage suffit à caractériser l’inapplicabilité manifeste de cette clause, dès lors que l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme garantit à tout justiciable un accès effectif au juge, sans condition de ressources.
Son argumentation est rejetée par la Cour de cassation, qui juge la clause d'arbitrage applicable sans que soit méconnu le droit à l’accès au juge. En effet, l'invocation par le demandeur de son impécuniosité n'est pas, en soi, de nature à caractériser l'inapplicabilité manifeste d'une telle clause, dès lors qu'il n'est pas soutenu qu'une tentative préalable d'engagement d'une procédure arbitrale a échoué, faute de remède apporté aux difficultés financières alléguées par le demandeur.
A noter :
La Cour de cassation a déjà jugé que l’état d’impécuniosité d’une partie ne rend pas la clause d'arbitrage manifestement inapplicable (Cass. 1e civ. 13-7-2016 no 15-19.389 FS-PB : RJDA 11/16 n° 833 dans un cas où le demandeur, en liquidation judiciaire, était dans l’impossibilité de s’acquitter des frais d’arbitrage).
La force obligatoire de la clause d'arbitrage est indépendante de la santé financière du signataire. La partie impécunieuse ne peut donc en tirer argument pour se soustraire à la compétence arbitrale et il appartient aux arbitres d'éviter tout déni de justice.
L’arrêt ci-dessus précise cependant, pour la première fois à notre connaissance, qu’il en serait autrement si la preuve était apportée de l’échec d’une tentative préalable d’engagement d’une procédure arbitrale pour des raisons financières.