Un salarié est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, à l'issue de deux visites médicales. Le jour même de cette seconde visite, il est convoqué à un entretien préalable à son licenciement pour inaptitude physique. Considérant que l'employeur n'a pas cherché à le reclasser, il saisit le juge prud'homal pour obtenir la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Seule la recherche de reclassement postérieure à la constatation de l'inaptitude physique compte
Seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de reclassement d'un salarié inapte (Cass. soc. 20-1-2010 n° 08-44.322 ; Cass. soc. 19-3-2014 n° 13-11.541).
Pour les juges, le point de départ de cette obligation se situe en conséquence au jour où le salarié est déclaré inapte : première visite en cas de danger immédiat dûment constaté par le médecin du travail, seconde visite de reprise dans le cas général (Cass. soc. 6-1-2010 n° 08-44.177).
En l'espèce, pour les juges du fond, le licenciement était régulier car le second avis d'inaptitude ayant été rédigé dans les mêmes termes que le premier, 15 jours plus tôt, l'employeur - petite structure de 7 salariés - avait effectué des recherches de reclassement entre les deux examens médicaux. Il était donc en mesure, quelques heures après que le salarié avait été déclaré inapte, de conclure à l'impossibilité d'un reclassement.
Cette décision est fermement censurée par la Cour de cassation, dans un arrêt destiné à être publié au bulletin de ses chambres civiles. Seules les recherches de reclassement postérieures au second avis d'inaptitude sont prises en compte pour apprécier le respect de son obligation par l'employeur. En l'espèce, ce dernier avait procédé à la recherche d'un poste avant le second avis du médecin du travail. Le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Un licenciement engagé dans un bref délai n'est pas nécessairement abusif
Faut-il en conclure que la Cour de cassation, après avoir assoupli sa jurisprudence sur la portée d'un bref délai entre l'avis d'inaptitude et l'engagement de la procédure de licenciement, revient à une position plus stricte ? Pas nécessairement.
La Cour a en effet longtemps jugé que la brièveté du délai écoulé entre le second avis médical d'inaptitude et l'engagement de la procédure de licenciement démontrait, à elle seule, le caractère hâtif, et donc abusif, du licenciement (Cass. soc. 30-4-2009 n° 07-43.219).
Mais en 2013, la chambre sociale a adopté une position plus pragmatique : pour caractériser un manquement de l'employeur, l'engagement rapide de la procédure de licenciement doit être corroboré par d'autres éléments : par exemple, l'absence d'actes positifs de recherche d'un poste ou la déloyauté de l'employeur (Cass. soc. 24-4-2013 n° 12-13.571 ; Cass. soc. 15-10-2014 n° 13-23.099). En effet, la recherche peut parfois être rapide : c'est particulièrement le cas lorsque l'entreprise est une petite structure, ou que le niveau de qualification du salarié lui interdit l'accès aux postes disponibles.
En pratique, l'employeur a tout intérêt à attendre quelques jours, pas seulement quelques heures, après le second avis médical d'inaptitude avant d'engager la procédure de licenciement.