Lors du règlement d'une succession qui s'éternise, des dépenses de conservation portant sur un lot de copropriété et ses parties communes sont engagées par l'un des coïndivisaires.
La cour d'appel, saisie d'une contestation sur ces dépenses, décide qu'un compte d'administration et de charges doit être établi par le notaire chargé des opérations de partage. Le compte d'indivision devant tenir compte de ces dépenses sera repris par ledit notaire.
Sans surprise, la Haute Juridiction censure l'analyse des juges du fond : il incombe au juge de trancher lui-même les contestations soulevées par les parties (C. civ. art. 4). Il ne peut se dessaisir et déléguer ses pouvoirs à un notaire liquidateur.
A noter :
L'arrêt commenté est une parfaite illustration, en matière d'indivision, du principe du droit au juge. « Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice » (C. civ. art. 4). Sur ce fondement, la Haute Juridiction a en effet forgé la notion de déni de justice par renvoi à un tiers. Il s'agit pour le juge de déléguer à tort ses pouvoirs à un tiers, et les illustrations ne manquent pas chaque fois qu'il y a lieu de liquider et de partager. Est ainsi caractérisé le déni de justice par renvoi au notaire liquidateur lorsque :
le juge lui donne pour mission d'apprécier si les biens sont aisément partageables en nature et d'ordonner, dans la négative, la licitation de ces immeubles, dans le cadre de la liquidation et du partage de la communauté ayant existé entre des époux (Cass. 1e civ. 8-7-2010 n° 09-13.155 : RTD civ. 2010 p. 766 obs. J. Hauser) ;
le juge lui délègue le calcul et la répartition de la créance d'un indivisaire contre l'indivision au titre de l'impôt foncier que celui-là a payé personnellement alors que les contestations des parties devant le juge portaient sur ces éléments. La mission de cet officier public ne pouvait être que de donner un avis de pur fait sur l'évaluation des créances des époux relatives au remboursement et au paiement des dettes litigieuses sans en fixer le montant (Cass. 1e civ. 8-7-2010 n° 09-13.737 : RTD civ. 2010 p. 766 obs. J. Hauser) ;
le juge renvoie les parties devant lui pour vérifier et calculer l'indemnité due à l'indivisaire pour les dépenses de conservation du bien indivis, à savoir le règlement des échéances d'emprunt afférentes à l'immeuble indivis (Cass. 1e civ. 26-1-2011 n° 09-72.422 : RTD civ. 2011 p. 331 obs. J. Hauser) ;
il s'est vu déléguer l'évaluation de la contribution respective des époux séparés de biens à la dette fiscale alors même que la contestation du calcul et de la répartition de cette dette était l'objet du contentieux judiciaire (Cass. 1e civ. 26-10-2011 n° 10-24.214 F-PBI : RTD civ. 2012 p. 102 obs. J. Hauser) ;
le juge lui renvoie la fixation du montant d'une créance au titre de la taxe foncière due par une indivision à un coïndivisaire, lequel s'en était acquitté pendant huit années consécutives. Ce dernier avait pourtant indiqué dans ses conclusions d'appel le montant exact de l'impôt dont il s'était acquitté et demandé que l'indivision en soit déclarée redevable (Cass. 1e civ. 24-9-2014 n° 13-21.005 F-PB : RTD civ. 2015 p.106 obs. J. Hauser).