Sauf dans les cas où la loi autorise l’intervention d’un mandataire, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ne peuvent décider par convention de faire exécuter une partie de leurs recettes ou de leurs dépenses par un tiers autre que leur comptable public, lequel dispose d’une compétence exclusive pour procéder au recouvrement des recettes et au paiement de dépenses publiques.
En l’espèce, une association bénéficie, par une convention d’occupation du domaine public, de la mise à disposition par une mairie d’une salle polyvalente, moyennant le versement d’une redevance fixée par le conseil municipal.
Cette association a sous-loué, pour une trentaine de manifestations totalisant environ 110 journées, cette salle à des tiers ; pour la Cour des comptes, les recettes perçues pour cette sous-location ont le caractère de recettes publiques, ce qui caractérise, de la part de l’association et de ses dirigeants, une gestion de fait.
Toutefois, pour le Conseil d’État, saisi d’un pourvoi contre cette décision, pour déterminer si les recettes perçues par un cocontractant de l'administration sont susceptibles de caractériser une gestion de fait, il appartient au juge des comptes de rechercher si, au regard de l'objet du contrat et de l'action du cocontractant, les recettes que ce dernier perçoit peuvent recevoir la qualification de recettes publiques. Tel est le cas lorsque l'administration a entendu confier à un organisme public ou privé l'encaissement de produits ou de revenus correspondant à la fourniture d'un bien ou d'un service par l'administration elle-même, un tel encaissement ne pouvant alors être organisé que dans les conditions prévues par la loi. En revanche, ne peuvent être qualifiées de recettes publiques les sommes correspondant au produit que le cocontractant tire de son activité propre d'exploitation d'un bien ou d'une prestation de services.
Même si la redevance versée à la mairie est très inférieure au prix facturé par le groupement, non encadré par les contrats passés avec la mairie, les recettes tirées par l'association de cette activité, qui n'est pas un service public communal, correspondent à la prestation de services accomplie par elle. Par suite, si les sommes reçues par la mairie en application des contrats passés avec l'association ont le caractère de recettes publiques, au même titre que celles perçues par la mairie du fait de sa propre activité de gestion de la même salle, la Cour des comptes a entaché son arrêt d'une erreur de qualification juridique des faits en estimant que les recettes perçues par l'association en contrepartie de son activité propre de location de la salle polyvalente présentaient le caractère de recettes publiques. N'a pas d'incidence à cet égard la question de savoir si la loi autorise l'intervention d'un mandataire, un tel principe ne trouvant pas à s'appliquer aux recettes retirées de son activité propre par un cocontractant de l'administration.
En conséquence, la décision de la Cour des comptes doit être annulée.
À noter : Cette décision du Conseil d’État, destinée à publication au recueil Lebon, est particulièrement importante car elle remet en cause une solution jusqu’ici communément admise par les chambres régionales et la Cour des comptes.
Patrice MACQUERON, professeur de droit privé et coauteur du Mémento Associations
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Associations n°s 15100 et 15600