1. L’article 120 de la loi de finances pour 2024 modifie l’article 1649 AE, I-4°-al. 2 du CGI afin de limiter l’obligation de notification à laquelle sont tenus les intermédiaires soumis au secret professionnel au regard de certains dispositifs transfrontières présentant un caractère potentiellement agressif.
2. On rappelle qu’en application de la directive 2011/16/UE modifiée par la directive UE/2018/822 du 25 mai 2018 dite directive « DAC 6 », reprise aux articles 1649 AD et suivants du CGI, ces dispositifs doivent être déclarés à l’administration fiscale par l’intermédiaire ayant participé à la mise en oeuvre du dispositif ou par le contribuable concerné (c’est-à-dire par l’utilisateur du dispositif).
S’agissant des intermédiaires soumis au secret professionnel dont la violation est réprimée par l’article 226-13 du Code pénal, l’article 1649 AE, I-4° du CGI (qui assure la transposition en droit interne de l’article 8 bis ter, 5 de la directive) prévoyait jusqu’à présent dans son alinéa 2 qu’à défaut d’avoir obtenu l’accord de son client pour souscrire la déclaration d’un dispositif transfrontière, l’intermédiaire devait notifier l’obligation déclarative qui lui incombait à tout autre intermédiaire impliqué dans le dispositif et en l’absence d’autre intermédiaire, au contribuable concerné par le dispositif transfrontière selon l’alinéa 3 de l’article 1649 AE, I-4° du CGI.
Des évolutions jurisprudentielles...
3. La Cour de justice de l’Union européenne a invalidé l’article 8 bis ter, 5 de la directive DAC 6, au regard du droit au respect des communications entre l’avocat et son client garanti par l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (Charte UE), en tant qu’il impose à l’avocat de notifier l’obligation déclarative à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client (CJUE 8-12-2022 aff. 694/20 : La Quotidienne du 12 janvier 2023). La même décision a, en revanche, validé la notification effectuée par l’avocat intermédiaire à son client, que ce dernier soit un autre intermédiaire ou le contribuable concerné.
Appliquant ces principes, le Conseil d’État a jugé que les dispositions de l’article 1649 AE, I-4°-al. 2 du CGI méconnaissaient les dispositions précitées de la Charte UE. Le Conseil d’État a jugé également qu’il en était de même pour les dispositions de l’article 1649 AE, I-4°-al. 4 du CGI (relatives aux modalités de notification) et celles de l’article 1729 C ter du même Code (qui sanctionnent les manquements à l’obligation de notification) en ce qu’elles concernent l’obligation de notification à un autre intermédiaire qui n’est pas le client de l’avocat intermédiaire. Le Conseil d’État a par conséquent annulé partiellement les commentaires administratifs correspondants (CE 14-4-2023 n° 448486 : La Quotidienne du 1er juin 2023).
... à l’origine d’une restriction du périmètre de l’obligation de notification des intermédiaires tenus au secret professionnel
4. Pour tenir compte de ces jurisprudences, et assurer une mise en conformité avec la Charte UE, l’article 120 de la loi modifie l’alinéa 2 de l’article 1649 AE, I-4° du CGI afin de préciser qu’un intermédiaire soumis au secret professionnel n’est désormais tenu à la notification de l’obligation déclarative qu’au seul intermédiaire ayant la qualité de client.
5. Il résulte de la nouvelle rédaction de l’article 1649 AE du CGI que pour que l’intermédiaire tenu au secret professionnel ne puisse échapper à son obligation de notification à un autre intermédiaire, son client (c’est-à-dire la personne qui le mandate) doit lui-même avoir la qualité d’intermédiaire dans le dispositif transfrontière au sens de l’article 1649 AE, I-1° du CGI.
6. Conformément à l’article 1649 AE, I-4°-al. 3 du CGI, l’intermédiaire soumis au secret professionnel reste tenu de notifier son obligation déclarative au contribuable concerné en l’absence d’autre intermédiaire.
7. En l’absence de disposition particulière et conformément à l’article 1er de la loi, cette modification entre en vigueur à compter du 1er janvier 2024. Elle devrait s’appliquer, à notre avis, aux obligations déclaratives notifiées par l’intermédiaire concerné à compter de cette date.