Un neurologue s’inscrit à un congrès médical organisé dans une ville loin de son domicile et réserve une chambre d'hôtel dans cette ville. Ayant annulé cette réservation en raison de son hospitalisation, il se heurte au refus de l’hôtel de lui rembourser le prix déjà versé. Il agit alors en remboursement de ce prix contre lui en se prévalant des dispositions du Code de la consommation, notamment de l'article L 212-1 relatif aux clauses abusives.
Jugeant qu’il ne peut pas revendiquer la qualité de consommateur en raison du lien direct existant entre sa participation au congrès médical et la réservation d'hôtel, un tribunal judiciaire rejette sa demande.
Le jugement est censuré par la Cour de cassation.
Pour l'application du Code de la consommation, on entend par (C. consom. art. liminaire) :
- consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;
- non-professionnel : toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles ;
- professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel.
Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, la notion de « professionnel » est une notion fonctionnelle impliquant d'apprécier si le rapport contractuel s'inscrit dans le cadre des activités auxquelles une personne se livre à titre professionnel (CJUE du 4-10-2018, aff. C-105-17, point 35 : RJDA 1/19 n°49).
En souscrivant le contrat d'hébergement, le neurologue n'agissait pas à des fins entrant dans le cadre de son activité professionnelle, de sorte la qualité de consommateur pouvait lui être attribuée.
A noter :
La qualité de consommateur fait souvent débat lorsqu’une personne physique conclut une opération entretenant des liens étroits avec une activité professionnelle ou économique. Ce contexte ne suffit pas à exclure la qualité de consommateur, rappelle la Cour de cassation, et c’est la finalité précise de l’acte, appréciée concrètement et au cas par cas, qui doit guider l’appréciation de la qualité de consommateur (déjà en ce sens Cass. 1e civ. 20-4-2022 n° 20-19.043 F-B : BRDA 13/22 inf. 17).
La Cour suprême s’inspire ainsi de la directive 2011/83/UE du 23 octobre 2011 : lorsque le contrat est conclu à des fins qui n'entrent qu'en partie dans le cadre de l'activité professionnelle de l'intéressé et lorsque la finalité professionnelle est si limitée qu'elle n'est pas prédominante dans le contexte global du contrat, le cocontractant devrait aussi être considéré comme un consommateur (Dir. 2011/83/UE considérant n° 17).
Elle a ainsi jugé qu’était un consommateur la personne physique ayant souscrit un prêt à taux variable pour financer un placement spéculatif dès lors qu’elle agit en dehors de son activité professionnelle (Cass. 1e civ. 22-9-2016 n° 15-18.858 F-PB : RJDA 3/17 no 207) ; de même, jugé que la qualité de trustee n’exclut pas la qualité de consommateur mais que le trustee ne peut se prévaloir de cette qualité pour soulever la prescription biennale de l’action de son avocat que s’il a eu recours à ses services à des fins non professionnelles (Cass. 1e civ. 21-10-2020 no 19-16.300 FS-PB : RJDA 2/21 no 133) et que le fait d’emprunter pour acheter des parts sociales n’exclut pas la qualité de consommateur (Cass. 1e civ. 20-4-2022 n° 20-19.043 F-B précité).
Au cas particulier, la réservation de la chambre d'hôtel avait été faite au nom du médecin et de son épouse. Même si la Cour de cassation n'en fait pas état, il est probable que cet élément a joué en faveur de la qualification de consommateur.