Un notaire est chargé de la vente, à Saint Jean de Luz, d’une maison qui appartient en indivision à un père et ses enfants, le premier étant plein propriétaire pour une moitié et usufruitier pour l’autre moitié, les seconds étant les nus-propriétaires. Un juge d’instruction ordonne la saisie pénale de la part du père dans le prix de vente (580 000 €) car ce dernier est mis en examen pour escroquerie et blanchiment (préjudice des victimes de plus de 7 millions d’euros).
Le notaire fait observer au juge qu’il a, dans son calcul, surévalué la part saisissable : une obligation de remploi du prix de vente de la maison est tacitement prévue entre l’usufruitier et les nus-propriétaires ; elle limite en conséquence la saisie à la fraction du prix perçue par les coindivisaires après remploi. Le mis en examen reprend l’argumentation à son compte. Mais la chambre de l’instruction estime notamment que l’obligation d’emploi n’est pas établie :
- elle n’est pas prévue par la donation-partage à l’origine du démembrement de propriété, qui a porté sur un précédent immeuble (ce bien a été vendu pour financer la maison de Saint-Jean-de-Luz) ;
- l’acte d’achat de la maison de Saint-Jean-de-Luz contient une déclaration de remploi qui s’analyse comme une déclaration d’origine des deniers ;
- l’autorisation pour le remploi des fonds prévue par le juge des tutelles ne concerne que l’un des enfants, encore mineur.
La Cour de cassation confirme. La saisie correspondant à la part du père sur le prix de vente est justifiée, le calcul du juge instructeur respectant bien l’acte opérant le démembrement de propriété qui ne comportait pas d’obligation de remploi. La Cour ajoute que le notaire doit exécuter l’injonction dès lors qu’il se trouve en mesure de le faire, indépendamment de toute circonstance extérieure à l’objet de la saisie.
Autrement dit, pas de discussion possible pour le notaire !
A notre avis, la solution aurait été identique en cas de saisie de la part d'un créancier du père.
Pour en savoir plus sur la saisie du prix de vente entre les mains du notaire : voir Mémento Vente immobilière n° 28300 s.