Un homme décède laissant à sa survivance son épouse en secondes noces, leur fille et ses deux fils issus de sa première union. Ces derniers assignent leurs cohéritières en rapport à la succession de diverses donations déguisées de parts sociales.
Un expert judiciaire est désigné pour examiner les cessions litigieuses. En appel, sa mission est étendue à une cession de parts sociales effectuée par une société à l’épouse. Motif : le défunt détenait lui-même des parts de cette société et était partie prenante des décisions sociales. Mère et fille contestent cette extension. Ne peuvent être considérées comme une libéralité du défunt et donc rapportées à sa succession que les droits ou biens qui étaient dans son patrimoine et dont il a disposé à titre gratuit (C. civ. art. 893).
La Haute Juridiction est sensible à leur argumentation et censure l’extension de la mission de l’expert. Les parts cédées à la veuve étaient détenues par une société, de sorte que le défunt n’en était pas propriétaire, il n’avait pu en disposer, fût-ce de manière déguisée.
A noter :
Qu’il s’agisse d’une donation notariée ou, comme dans cette affaire, d’une donation tacite présumée, l’acte litigieux doit répondre à la définition de libéralité. Le Code civil en donne une définition imparfaite et implicite (M. Grimaldi : Libéralités. Partages d’ascendants, Litec 2000, n° 1000). La libéralité suppose la réunion de deux critères : le premier, subjectif, à savoir l’intention libérale du disposant envers le gratifié ; le second, objectif, qui implique un appauvrissement du disposant et, corrélativement, un enrichissement du bénéficiaire (Mémento Successions Libéralités 2021 dir. B. Vareille n°s 100 s.). En l’espèce, l’absence de ce dernier critère condamnait la commande d’une expertise par la cour d’appel : la cession contestée n’entraînait aucun appauvrissement du disposant comme ne portant pas sur un élément de son patrimoine.