La loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice envisageait, dans un souci d'allègement des tâches incombant aux juridictions, que la mission de délivrer la légalisation et l’apostille des actes publics français soit déléguée à des officiers publics ou ministériels (Loi 2019-222 du 23-3-2019 art. 16 : BPAT 3/19 inf. 95). C’est désormais chose faite. À compter du 1er septembre 2023,les notaires auront compétence pour accomplir les formalités de légalisation et d’apostille.
Si l’acte doit être produit dans un État non partie à la convention de La Haye du 5 octobre 1961 sur l’apostille, et sauf existence d’un texte dispensant de toute légalisation, la légalisation donnera lieu à l’apposition sur l’acte d’une signature et d’un sceau à venir. Si, en revanche, l’acte doit être produit dans un État partie à la convention de La Haye, ce qui sera extrêmement fréquent compte tenu de l’excellente ratification de cette dernière (120 États au 18 janvier 2021 sur 197 États reconnus par l’ONU), c’est une apostille, conforme à la Convention, qui sera apposée sur l’acte.
Concrètement, la demande sera adressée par voie dématérialisée pour les actes établis sous forme électronique, ou par courrier ou présentation physique à l’étude pour les actes publics non dématérialisés. La légalisation ou l’apostille devra alors être délivrée dans un délai de trois jours ouvrés dès lors que les informations nécessaires seront disponibles dans la base de données.
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A noter :
Comme le rappelle Pierre Callé, professeur à l’université Paris-Saclay (Paris-Sud), ce transfert de compétence posait plusieurs problèmes.
Premièrement, les services apostilles des cours d'appel ont aujourd'hui, pour vérifier l'authenticité des actes, une base de données des signatures et des sceaux, qui est actualisée en permanence (nomination d'un nouvel officier public, élection d'un nouvel officier d'état civil dans une commune, etc.). Le nouveau décret prévoit la création d’une base de données nationale des signatures publiques (art. 6), alimentée d’office par une liste d’autorités publiques (art. 7). C’est après la consultation de cette base de données que les notaires pourront légaliser ou apostiller un acte.
Deuxièmement, les apostilles sont aujourd’hui sujettes à numérotation et inscription dans un registre afin de permettre leur contrôle. Plusieurs questions se posaient. Qui tiendra ce registre ? Sera-t-il propre à chaque autorité émettrice ou centralisé ? Et quid des registres actuels tenus dans chaque cour d'appel pour toutes les apostilles qui ont déjà été délivrées ? Sera-t-il transféré à la nouvelle autorité désignée ? Le décret apporte des réponses à certaines de ces questions. Le Conseil supérieur du notariat se voit ainsi chargé de tenir un fichier électronique enregistrant l’ensemble des légalisations et apostilles délivrées sous forme électronique (art. 16). Le fichier sera donc centralisé. Ce fichier pourra être consulté sans frais par les autorités étrangères destinataires des actes apostillés ou légalisés. Le registre nouvellement tenu par le Conseil supérieur du notariat sera également dématérialisé. On avait plusieurs fois pu regretter que la France ne s’engage pas dans le programme d’e-registre développé par la Conférence de La Haye afin de faciliter le contrôle des apostilles émises, qui est, aujourd’hui, il faut le reconnaître, quasi-inexistant (voir par exemple, P. Callé, Légalisation et apostille : quelles nouveautés ? : SNH 14/19 inf. 14). Il aura donc fallu que l’État transfère la charge des apostilles au notariat pour qu’il s’engage dans la voie de la dématérialisation.
Restait la question du coût, car, pour les justiciables, la délivrance d'une apostille est aujourd'hui gratuite en France si l'on excepte le coût de l'enveloppe timbrée que l'on doit joindre à sa demande. Le principe de gratuité pouvait difficilement être maintenu en transférant la charge des apostilles au notariat. Le décret se contente de renvoyer à un futur arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre des affaires étrangères le soin de fixer le montant de la redevance à laquelle donneront lieux les formalités de légalisation et d’apostille (art. 15).