L'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 (JO 23) a modifié l’article L 1233-4 du Code du travail relatif aux modalités de diffusion des offres de reclassement préalable au licenciement économique. Ainsi, depuis le 22 décembre 2017, date d’entrée en vigueur du décret 2017-1725 du 21 décembre 2017 (JO 22) pris pour l’application de ce texte, l’employeur peut, au choix, adresser aux salariés menacés de licenciement économique une ou plusieurs offres de reclassement personnalisées ou diffuser une liste de postes disponibles auxquels les salariés concernés peuvent postuler. Mais, pour les procédures de licenciement engagées avant le 22 décembre 2017, l’employeur ne disposait pas d’un tel choix : il devrait adresser à chacun des salariés concernés des offres de reclassement précises, concrètes et personnalisées (notamment : Cass. soc. 7-7-2004 n° 02-42.289 F-D ; Cass. soc. 18-1-2005 n° 02-46.737 F-D). C’est cette règle qui s’appliquait dans l’arrêt du 11 mai 2022, la procédure de licenciement ayant été engagée en mars 2017.
L’employeur, qui envisageait la suppression de 7 postes, avait sollicité les entreprises du groupe et avait été en mesure de proposer aux salariés menacés de licenciement plusieurs offres de reclassement adaptées à leurs compétences, en les invitant à se porter candidats. L’un des salariés, licencié à l’issue de la procédure, soutenait que, en proposant la même offre de reclassement à plusieurs candidats, les mettant ainsi en concurrence sur un même emploi, l’employeur n’avait pas respecté son obligation de reclassement. L’argument avait été entendu par la cour d’appel, qui avait jugé le licenciement abusif : selon elle, la décision d’accepter ou non un reclassement relève de la seule volonté du salarié et l’attribution du poste ne peut pas être subordonnée à un processus de recrutement.
Cette analyse est censurée par la Cour de cassation, qui considère que la cour d’appel avait ajouté à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas. Le Code du travail exige en effet de l’employeur qu’il propose au salarié tous les emplois disponibles et susceptibles de correspondre à ses aptitudes et ses compétences. Par conséquent, l’application de ce principe peut conduire à proposer le même poste à plusieurs salariés (voir déjà, en ce sens, Cass. soc. 19-1-2011 n° 09-42.736 F-D). Dans cette situation, si plusieurs salariés expriment leur intérêt pour le poste, l’employeur doit départager les candidats en s’appuyant sur des critères objectifs : ancienneté, expérience, diplômes, etc. Mais en aucun cas il ne peut décider, en amont, de ne soumettre l’offre de reclassement qu’à un seul salarié, même s’il considère que son profil est le plus adapté au poste.
A noter :
La solution aurait été la même si la procédure de licenciement avait été engagée à partir du 22 décembre 2017 et que l’employeur avait fait le choix de transmettre des offres personnalisées aux salariés. S’il avait opté pour la diffusion d’une liste de postes disponibles, l’article D 1233-2-1 du Code du travail lui aurait imposé de préciser les critères de départage entre salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste.
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