Les documents administratifs dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret des affaires ne sont communicables qu'à l'intéressé (CRPA art. L 311-6, 1°).
Une association de lutte contre la corruption demande à l'administration de lui communiquer les comptes annuels d'une fondation d'entreprise qui lui ont été transmis dans le cadre de sa mission de contrôle de l'activité de ces organismes.
Le Conseil d'Etat refuse au motif que les comptes annuels d'une fondation d'entreprise n'ayant reçu aucune subvention publique relèvent de sa vie privée au sens de l'article L 311-6 et ne sont donc pas communicables aux tiers, en l'absence de disposition législative le prévoyant expressément.
En effet, le texte précité s'applique aux personnes morales de droit privé et exclut la communication, par l'administration qui les détient, des documents relatifs notamment à leur fonctionnement interne et à leur situation financière. La circonstance que de tels documents aient été transmis à l'administration afin de permettre à celle-ci d'exercer un contrôle est sans incidence sur la question de leur communication aux tiers.
A noter :
Le Conseil d'Etat réaffirme sa jurisprudence reconnaissant aux personnes morales une vie privée (CE 17-4-2013 n° 344924).
Certains textes autorisent expressément la communication de documents relevant de la vie privée d'une personne morale tels que définis par le Conseil d'Etat (documents relatifs notamment à son fonctionnement interne et à sa situation financière) ; tel est le cas des statuts d'une fondation (Décret 90-1005 du 30-9-1991 art. 13 pris pour l'application de loi 90-559 du 4-7-1990) ou encore de ses comptes, mais uniquement si elle a reçu des subventions publiques (Loi 2000-321 du 12-4-2000, art. 10).
La solution rendue dans la présente décision vise les personnes morales de droit privé en général et peut donc être étendue notamment aux documents que les sociétés sont susceptibles de transmettre à l'administration fiscale en application du Livre des procédures fiscales (LPF) et qui ne font ni l'objet d'une publication au registre du commerce et des sociétés ni d'un droit de communication directe au profit d'un tiers. Tel est le cas des comptes des sociétés civiles (LPF art. 94 A) ou des registres sur lesquels les procès-verbaux des conseils d'administration ou de surveillance sont conservés (LPF art. 85).
La Cour de cassation refuse, à l'inverse du Conseil d'Etat, de reconnaître à une personne morale le droit de se prévaloir d'une atteinte à la vie privée : elle a jugé que, si les personnes morales disposent, notamment, d'un droit à la protection de leur nom, de leur domicile, de leurs correspondances et de leur réputation, seules les personnes physiques peuvent se prévaloir d'une atteinte à la vie privée au sens de l'article 9 du Code civil (Cass. 1e civ. 17-3-2016 n° 15-14.072 : RJDA 6/16 n° 439).
Retrouvez toute l'actualité en matière de droit des sociétés, droit commercial et de la concurrence dans Navis Droit des Affaires !
Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Droit des Affaires pendant 10 jours.