Il appartient au juge administratif, lorsqu’il se prononce sur le caractère d’utilité publique d’une opération nécessitant l’expropriation d’immeubles ou de droits réels immobiliers, de vérifier successivement que trois conditions sont remplies :
l’opération répond à une finalité d’intérêt général ;
l’expropriant n’est pas en mesure de réaliser l’opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l’expropriation ;
les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d’ordre social ou économique que l’opération comporte ne sont pas excessifs au regard de l’intérêt qu’elle présente.
Cette méthode définie par la jurisprudence (CE 19-10-2012 n° 343070, Cne de Levallois-Perret : BPIM 6/12 inf. 433) est mise en œuvre par le Conseil d’État à l’occasion d’un recours contre une DUP portant sur l’aménagement d’un quartier de logements et d’activités dans le cadre d’une zone d’aménagement concertée (ZAC).
Au titre de la deuxième condition, les sociétés requérantes, propriétaires de parcelles expropriées, font valoir qu’elles avaient sur ces parcelles un projet d’aménagement foncier compatible avec les documents d’urbanisme et présentant de fortes convergences avec les objectifs poursuivis par la ZAC. Elles en déduisent que l’opération d’aménagement projetée par la collectivité expropriante pouvait être réalisée sans expropriation.
Le Conseil d’État écarte cet argument : il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet des sociétés permettait d’atteindre des objectifs équivalents à ceux poursuivis par la collectivité à travers l’opération d’aménagement déclarée d’utilité publique. Les première et troisième conditions étant par ailleurs remplies, le recours est rejeté.
A noter :
Pour vérifier que la collectivité expropriante n’était pas en mesure de réaliser l’opération sans recourir à l’expropriation, le juge se borne le plus souvent à s’assurer que cette collectivité ne disposait pas déjà de terrains adaptés. L’arrêt commenté révèle que le contrôle peut aussi porter sur l’existence d’un projet privé, porté par les propriétaires des parcelles expropriées, qui permettrait d’atteindre les objectifs d’intérêt général poursuivis par l’expropriation.
Le Conseil d’État n’a pas écarté comme inopérante l’argumentation présentée sur ce point par les sociétés requérantes. S’il n’y a pas fait droit, c’est parce qu’il n’était pas établi que le projet d’aménagement privé allégué aurait permis d’atteindre des objectifs équivalents à ceux de l’expropriant. En théorie au moins, il n’est donc pas exclu qu’un tel moyen puisse conduire à une annulation de la DUP.
L’arrêt rappelle par ailleurs qu’il appartient également au juge, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l'expropriation, que l'inclusion d'une parcelle déterminée dans le périmètre d'expropriation n'est pas sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique (CE 6-7-2016 n° 371034, Cne d’Achères et autres et Sarry 78 : BPIM 5/16 n° 300). En l’espèce, l’inclusion des parcelles des sociétés requérantes n’était pas dépourvue de rapport avec l’opération d’aménagement.
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