Un avocat, mis en redressement puis en liquidation judiciaires, est contraint de cesser temporairement son activité pour des raisons de santé.
L'avocat réclame à la Caisse nationale des barreaux français les allocations prévues en cas d’invalidité temporaire, mais la Caisse refuse car il n’est pas à jour de toutes ses cotisations. L’avocat invoque alors l’article L 622-13 du Code de commerce : en vertu de ce texte, le cocontractant d’un débiteur en procédure collective est tenu de remplir ses obligations même si le débiteur n’a pas exécuté les siennes avant l’ouverture de la procédure collective. La Caisse est donc tenue, soutient-il, de lui verser les allocations même s’il n’a pas versé les cotisations échues avant l’ouverture de la procédure collective.
La Cour de cassation écarte l’argument. En effet, le régime d'affiliation des avocats à la Caisse nationale des barreaux français imposé par l'article L 723-1 du Code de la sécurité sociale est de source légale. En conséquence, cette Caisse n'a pas la qualité de contractant de l’avocat et ce dernier ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article L 622-13 du Code de commerce concernant les seuls contrats en cours.
A noter : La solution peut paraître surprenante. Dans de précédentes décisions, la Cour de cassation a en effet jugé que le bénéficiaire d’un régime de protection sociale ou de retraite (commerçant, artisan, dirigeant…) n’est pas privé, lorsqu’il fait l’objet d’une procédure collective, de tout droit à prestation même en l’absence de règlement intégral de ses cotisations antérieures (notamment, Cass. com. 13-3-2007 n° 05-20.396 : RJDA 7/07 n° 748 ; Cass. 2e civ. 28-5-2009 n° 08-13.152 F-D ; Cass. com. 28-06-2011 n° 09-16.646 FS-PB : RJDA 11/11 n° 939), peu important que cette protection soit obligatoire (cf. Cass. 2e civ. 17-1-2007 n° 04-30.797 : RJS 4/07 n° 488) et que sa réglementation prévoie la déchéance de la garantie pour défaut de paiement même partiel des cotisations. Pour la Haute Juridiction, les cotisations impayées sont simplement exclues pour le calcul des prestations dues (même arrêts).
Cette nouvelle décision ne constitue pas un revirement de jurisprudence. Dans les affaires précitées, était invoquée l’interdiction pour le débiteur de payer toute créance née antérieurement à l’ouverture d’une procédure collective (C. com. art. L 622-7), y compris une créance de cotisations sociales. Compte tenu de cette impossibilité légale de régulariser sa situation, il est difficile de priver le débiteur de toute prestation.
Le pourvoi en cassation n’invoquait pas cette règle, mais seulement celle de la poursuite des contrats en cours (C. com. art. L 622-13), inapplicable faute de lien contractuel entre l'avocat et la CNBF.
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 61711