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La réaffectation du salarié dans son emploi d’origine nécessite-t-elle son consentement ?

Dans le cadre de son pouvoir de direction, l'employeur peut être amené à proposer un changement de poste au salarié. Mais peut-il lui imposer un retour dans son poste initial ? Non, répond la chambre sociale de la Cour de cassation. La réaffactation dans un poste précédemment occupé nécessite l'accord du salarié.

Cass. soc. 21-6-2023 n° 22-13.514 F-D, L. c/Sté ASC Groupe


Par Valérie BALLAND
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©Gettyimages

Le salarié est embauché pour occuper un poste déterminé, auquel correspondent certaines tâches et/ou responsabilités. Au cours de la relation de travail, en fonction des circonstances, l'employeur peut être amené à aménager le poste de travail ou à modifier les tâches confiées à l’intéressé. Dans ce cadre, le retour du salarié dans un emploi précédemment occupé constitue-t-il un simple changement de ses conditions de travail, que l’employeur peut lui imposer en vertu de son pouvoir de direction, ou, au contraire, une modification de son contrat de travail nécessitant son accord préalable ? C’est à cette question que la chambre sociale de la Cour de cassation devait répondre en l’espèce.

Une salariée réaffectée dans son poste initial après un changement de fonctions

Une salariée avait été engagée en 2012 en qualité d’auxiliaire ambulancière, puis affectée à compter du mois de juin 2016 à des tâches administratives. En février 2018, son employeur l’avait informée de sa réaffectation sur un poste d’auxiliaire ambulancière à compter du mois suivant. La salariée ne s’étant pas présentée à ce poste de travail, elle avait été licenciée pour faute grave au titre d’un abandon de poste. Elle avait alors saisi le conseil de prud’hommes pour contester son licenciement, estimant que sa réaffectation dans son poste initial constituait une modification de son contrat de travail qui ne pouvait s’opérer sans son consentement.

La cour d’appel avait rejeté sa demande. Pour considérer que le retour de la salariée dans l'emploi d'auxiliaire ambulancière ne constituait qu'une modification de ses conditions de travail ne nécessitant pas son accord et jugé le licenciement pour faute grave fondé, les juges du fond avait relevé que la modification de l’emploi n’avait fait l’objet d’aucun avenant au contrat de travail et que l’affectation définitive à un emploi différent de l’emploi habituel n’avait donné lieu à aucune notification écrite, comme l’exige la convention collective des transports routiers applicable en l’espèce. En outre, selon eux, l'exercice d'un emploi distinct, même pendant une longue durée (18 mois en l’occurrence), n'a pas pour conséquence de priver d'effet le contrat de travail sur la désignation initiale de l'emploi.

Le retour dans les fonctions antérieures nécessite l’accord exprès du salarié

La Cour de cassation censure ce raisonnement : dès lors que la salariée, engagée comme auxiliaire ambulancier, avait été affectée en 2016 dans un emploi distinct de secrétaire de facturation ne constituant pas un emploi temporaire, sa réaffectation dans son emploi d’origine constituait bien une modification de son contrat de travail qui nécessitait son accord exprès. Peu important l’absence d’avenant au contrat ou le non-respect par l’employeur des dispositions de la convention collective. L’affaire devra donc être rejugée par la cour d’appel de renvoi.

A noter :

En l’espèce, la durée de l’affectation aux nouvelles fonctions semble déterminante (voir déjà en ce sens : Cass. soc. 2-3-1994 n° 90-40.080 D  ; Cass. soc. 17-10-2007 n° 05-42.525 F-D ; Cass. soc. 20-1-2010 n° 08-42.739 F-D). La même solution peut s’appliquer lorsque le salarié accepte, par avenant à son contrat de travail, de remplacer temporairement un collègue absent (Cass. soc. 11-1-2006 n° 03-46.698). Tout dépend en fait de la manière dont cet avenant est rédigé. Il peut en aller différemment, en effet, si dans celui-ci, l'intéressé a expressément accepté le principe d'une réintégration dans l'emploi antérieur et la perte du complément de salaire qui lui était versé le cas échéant pendant le remplacement (Cass. soc. 31-5-2012 n° 10-22.759 FS-P).

Documents et liens associés

Cass. soc. 21-6-2023 n° 22-13.514 F-D, L. c/Sté ASC Groupe

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